Un espion pour suivre un grand cétacé

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Deux balises satellites Argos ont été posées sur le dos de rorquals bleus dans l’estuaire cet l’automne. «L’une des deux balises, installée sur un mâle connu de l’équipe du MICS, transmet toujours à ce jour et révèle que l’animal a passé quelques temps au nord des Îles de la Madeleine avant de s’éloigner dans le détroit de Cabot», renseigne la chercheuse Véronique Lesage de Pêches et Océans Canada (MPO) qui pilote le projet. Où ira-t-il après? Les rorquals bleus passent du temps dans les eaux riches du Saint-Laurent pour se nourrir et refaire leurs réserves énergétiques. Migrer à l’automne leur permet de rejoindre des eaux plus tempérées vraisemblablement pour se reproduire, mais ces déplacements saisonniers et les aires d’hivernage sont encore mal définis.

Le projet de suivis satellites vise justement à combler ce manque de connaissances sur les aires intensément utilisées par les rorquals bleus et constituant l’habitat essentiel de cette population. «La Loi sur les espèces en péril au Canada (LEP) requiert d’identifier l’habitat essentiel du rorqual bleu et de le protéger. Or, en 2012, il fut conclut que les données existantes étaient trop fragmentaires pour procéder à une quelconque désignation. Ce constat a mené à une autre obligation légale du MPO, soit de mener les études nécessaires, afin de pouvoir procéder cinq ans plus tard à une désignation minimale de l’habitat essentiel (p. 36). C’est dans ce cadre que s’inscrit la présente étude, et d’autres menées par d’autres chercheurs du MPO des trois régions de l’Atlantique (Terre-Neuve et Labrador, Maritimes et Québec) » souligne la Dre Lesage.

Cette étude, mise de l’avant par le MPO, et menée en collaboration avec l’équipe du MICS et le chercheur Russ Andrews du Alaska SeaLife Center, en est à sa cinquième année. Depuis 2010, 20 suivis télémétriques ont été réalisés. L’hiver dernier, le rorqual bleu Symphonie a été suivi pendant plus de cinq mois à travers l’Atlantique. Compte tenu de la difficulté à maintenir ces balises attachées sur de longues périodes (la durée du déploiement varie généralement de quelques jours à 70 jours), il s’agissait alors d’un record. Symphonie a d’ailleurs été revue cet automne dans l’estuaire. Véronique Lesage espère bien connaître le même succès qu’ils ont eu avec Symphonie. Peut-être la filature de ce mâle nous révèlera-t-elle d’autres aires d’hivernage, différentes de celles fréquentées par Symphonie.

Une revue de l’ensemble des données pertinentes à la désignation de l’habitat essentiel, incluant les nouveaux résultats obtenus par le MPO depuis 5 ans, est prévue à Vancouver en février prochain. Ces résultats seront communiqués à l’équipe de rétablissement du rorqual bleu, des experts de différents horizons, qui effectuera une recommandation au ministre des Pêches et Océans, qui pourra ainsi évaluer ces informations et procéder à une désignation, au moins minimale, de l’habitat essentiel du rorqual bleu afin de le protéger.

 

Par Marie-Sophie Giroux
LA UNE : Photo : © Pêches et Océans Canada