Au Népal, le sol tremble encore en février

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Contrairement aux touristes occupés à préparer l’ascension de l’une des plus belles montagnes du monde, je suis de passage dans le Thamel à Katmandou par affaires. Pour le plus grand nombre, le Népal est synonyme de trekking. Pour moi, c’est une douche d’humanité, un voyage commercial et une méditation.

Je vous raconte.

Pas besoin d’aller très loin pour jouir du panorama majestueux des montagnes. Heureusement, car je n’ai pas eu assez de temps pour en respirer l’air ni marcher sur les hauteurs qui offrent un autre point de vue sur le monde. La beauté du Népal est visible de tous les angles et les touristes se font discrets en raison du séisme de l’an dernier. Malgré tout, la vie suit son cours.

Revoir mes ami(e)s, mes agents et mes fournisseurs me fait du bien à l’âme. De la dame aux allumettes au vieux qui nous assourdit avec son instrument de bois à vendre. Prendre mon café dans la rue, aborder les gens dans une langue qui ne m’est pas du tout familière et rire à la vue d’écoliers qui s’amusent à se lancer des feuilles pendant que les plus vieux se remémorent quelque souvenir d’antan. Ici, on aborde la vie au présent, sans trop de lourdeur, malgré le sol qui tremble.  

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Après avoir sélectionné judicieusement les modèles et les batiks aux couleurs estivales qui seront intégrés à notre collection printemps-été 2016 du Népal, je décide d’aller à la rencontre des villageois pour qui nous avions récolté de l’argent après le tremblement de terre de l’an dernier. Mon ami guide, Binaya, et son chauffeur me mènent tôt le matin dans le village de Sunkhani, situé à quelque 2 h 30 de Katmandou, sur une route de montagne rocailleuse.

Des champs de pommes de terre et des cordes à linge qui me rappellent notre chez-nous se superposent dans un décor de campagne digne d’une époque ancienne. Nous visitions la ferme d’un Français un brin marginal qui produit des légumes biologiques… et qui parle étonnamment bien le népalais. Seul à labourer sa terre, savourant sa réussite à chaque bouchée, il partage avec nous un repas goûteux à saveur népalo-française.

Nous nous arrêtons prendre un autre repas dans une habitation où logent temporairement les parents et la femme joliment enceinte de Binaya. Bien que le tremblement ait eu lieu il y a presque un an, la terre tremble encore et aucune maison n’a été reconstruite comme à l’origine. Le gouvernement n’a toujours pas dédommagé les 40 familles de ce petit village. Ces familles sont unies pa
r la force du partage et la solidarité dont ils font preuve est une trace tangible de leur courage des derniers mois. Leur désir de s’en sortir m’a atteint comme un missile en plein cœur.

Clin d’œil de la terre : le sol s’est justement mis à trembler pendant que nous buvions un thé au citron sur une table fabriquée avec des restants de bois de la maison. J’ai pu voir la peur, mais aussi l’habitude de cette émotion liée à l’agitation du sol qui n’est due ni à une console de son ni à un manège de fête foraine. C’est la terre qui parle. Qui grogne plutôt.

La pluie nous annonce qu’on doit partir. Elle devient si forte que l’eau, traversant la route à grand débit, nous oblige à nous arrêter et à sortir de la petite voiture, malgré le froid, pour prendre des cailloux et de plus grosses pierres et former un petit barrage qui va permettre aux autres véhicules de passer malgré ces averses qui se sont depuis transformées en pluie de petites perles blanches. C’est l’hiver, ici aussi.

Méditation au monastère de Kopan

Le sol népalais vient encore de trembler, à une magnitude de 5,8. Je l’ai ressenti comme un avion qui passerait à 30 pieds au-dessus de ma tête. J’en étais alors à ma deuxième nuit au monastère, à me demander ce qui se passait, perdue quelque part entre le sommeil et le son des voix graves des moines. Je me suis recouchée, tremblante, habitée d’une peur inconnue sous mes draps blancs.

En ces lieux de doux silence, je me promène vêtue de mon blouson de cuir noir et d’un tissu rose couvrant mes épaules, laissant voir mes longs cheveux rouge-orangé. Voilà un léger contraste avec ces centaines de moines au crâne rasé et à la tenue orange et bourgogne.

Je ne sais trop comment aborder cette retraite de quatre jours. Beaucoup de mots se sont glissés dans mon petit cahier Canada. C’est le genre d’endroit où, malgré ma différence physique évidente, malgré mon incompréhension des textes et des chants de prière, j’arrive à me sentir à ma place, dans une langue où tout jugement disparaît et où les paroles s’inscrivent dans le corps et le ressenti.

Même après avoir quitté ces lieux et le son des chants bouddhistes, je continue d’entendre et sentir cette vibration, telle une chanson qui résonne dans le silence. Je revois des images de gens formidables, connectés à la même intention que moi, celle de trouver des réponses par la méditation. Dania et Nataly, de la Colombie; Audrey, du Pérou; Rachael, de la Floride; Jeannette, de Washington; Philippe, du Midi de la France; Petra, d’Autriche; Ulla, de la Suède; et Herman… d’un peu partout. Je vous emporte tous dans mes pensées, gravés sur mon disque dur interne, dans le dossier Voyage au Népal, section Lieux de méditation. Vous et tou(te)s ces Tibétain(e)s d’origine venus par centaines, par milliers, en ce dernier jour du Great Prayer Festival, un important moment de recueillement pour ce peuple en exil depuis si longtemps. Et une drôle d’impression… celle de se retrouver, un moment, dans le nord de l’Inde, il y a 10 ans à Dharamsala, pour ceux qui connaissent le lieu où vit le dalaï-lama.

Pour voir les lieux du monastère : www.kopanmonastery.com

Merci à tous ces moines qui nous ont accueillis. Merci au livre de Zopa Rinpoché que j’ai étudié pour tenter de devenir une meilleure personne. Les voyages nous changent parce qu’ils nous donnent accès à l’inconnu et nous obligent à de multiples remises en question. Les voyages nous portent à partager, à accepter la différence et à souligner qui nous sommes, ce que nous voulons.

De retour au pays, la grippe m’a frappée dès la sortie de l’avion. Évidemment.

Je vous invite à voyager, de la manière dont vous le pouvez, par les mots, les écrits, la lecture, par l’audace d’essayer une nouvelle recette ou simplement en visionnant des images d’ailleurs, celles qui vous donnent accès à l’autre. Vous y découvrirez le sens du commun, celui qui fait que peu importe où nous sommes, nous sommes tous reliés.

À la prochaine, chers voyageurs!