Des chasseurs de phoques veulent reprendre la chasse aux blanchons

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L’interdiction de la chasse aux blanchons au Canada est une «erreur historique», croient les chasseurs des Îles-de-la-Madeleine, qui réclament qu’elle soit à nouveau permise. Selon eux, en plus de rétablir l’écosystème, le retour de la controversée pratique remettrait sur les rails l’industrie mise à mal au cours des dernières années.

«C’est une nécessité», affirme sans détour le directeur de l’Association des chasseurs de phoques des Îles-de-la-Madeleine, Gil Thériault. La chasse a été mauvaise cette année. En raison des glaces, le seul équipage qui s’est aventuré au large n’a récolté que 150 bêtes, beaucoup moins que ce qui avait été espéré.

C’est que la fenêtre d’opportunité est très mince pour les chasseurs. Lorsque les phoques du Groenland donnent naissance à proximité des Îles, ils sont intouchables puisque les bébés – ou blanchons – sont protégés par le gouvernement du Canada depuis 1987. Ce n’est que lorsque ceux-ci commencent à perdre leur fourrure blanche qu’ils peuvent être tués. Le hic est qu’à ce moment, les troupeaux sont très difficiles à atteindre, explique le président du même regroupement de chasseurs, Denis Longuépée.

Or, les phoques plus âgés seraient beaucoup moins lucratifs. «Ils ont une valeur pour le gras et pour la viande, mais leur fourrure ne vaut rien, explique-t-il. Nous, on veut les exploiter au maximum, on ne veut rien jeter», renchérit M. Longuépée, selon qui il y a une demande pour la fourrure de blanchons. «Il y a des gens qui nous contactent qui nous disent qu’ils seraient intéressés à en acheter», assure le président, qui dit avoir entamé des démarches l’an dernier auprès de Pêches et Océans Canada pour revoir la réglementation.

Gérer la population

Mais avant tout, la chasse aux blanchons permettrait de mieux gérer la population des phoques, croit l’Association des chasseurs de phoques des Îles-de-la-Madeleine. Celle-ci évalue qu’il y a quelque 750 000 phoques gris dans le golfe du Saint-Laurent et environ 7,8 millions de phoques du Groenland qui descendent à l’ouest des Îles pendant la période de mise bas.

«Ils mangent 15 fois plus de poissons que ce qu’il nous est permis de pêcher dans l’est du Canada», s’exclame Gil Thériault. Selon M. Longuépée, les mammifères marins pigent allégrement dans le garde-manger des Québécois dans l’indifférence la plus complète. L’écosystème doit être rétabli, soutiennent les deux chasseurs.

Ils font également valoir que la mise à mort d’un bébé phoque n’est pas plus cruelle que celle d’un adulte. «Au contraire, comme il ne peut pas se déplacer, il y a moins de chances qu’on le blesse», explique M. Thériault, qui ne comprend pas qu’on permette l’abattage de veaux et d’agneaux, mais pas celle de blanchons.

Il croit aussi que la population canadienne n’est pas fermée au retour de la chasse aux blanchons, et ce, malgré les campagnes «à coups de millions» menées par les regroupements qui se portent à la défense des animaux. Selon un sondage Léger mené par Internet en juin 2013 auprès de 1502 Canadiens pour le compte de l’Association (la marge d’erreur n’est pas disponible), 37 % d’entre eux se disaient favorables, contre 35 % en défaveur et 27 % préféraient ne pas répondre.

La directrice de programmes au Fonds international pour la protection des animaux (IFAW), Sheryl Fink, croit que le retour à la chasse aux blanchons porterait un coup fatal au marché du phoque, déjà passablement amoché depuis que l’Union européenne interdit l’importation de ses produits dérivés en 2010. «Ce serait désastreux dans l’opinion publique», avance celle qui dénonce du même coup la volonté des chasseurs de revenir en arrière avec des pratiques «cruelles».

«Le Gouvernement du Canada n’envisage pas de permettre la chasse aux blanchons», a pour sa part affirmé la porte-parole de Pêches et Océans, Mélanie Carker.