Air Canada fait rager des députés

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Au tour des députés fédéraux de s’insurger contre la décision d’Air Canada de suspendre son service dans plusieurs villes éloignées. La ministre québécoise Diane Lebouthillier et des élus bloquistes déplorent que la fin de ces liaisons aériennes les empêchera désormais non seulement de se rendre eux-mêmes au travail, à Ottawa, mais que cela enclavera en outre leurs commettants dans leurs régions.

« Honte à Air Canada ! » La ministre libérale du Revenu national, Diane Lebouthillier, ne mâche pas ses mots pour critiquer l’annonce du transporteur aérien. « Comme entreprise, Air Canada, c’est une honte ! D’avoir agi de cette façon-là, sans aucun respect ni pour les gens des régions ni pour les différents paliers de gouvernement, pour moi c’est épouvantable », scande-t-elle en entrevue téléphonique.

La députée de Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine comprend bien l’effet qu’aura ce changement pour les résidants de sa région. « Actuellement, avec ce qu’Air Canada vient d’annoncer, moi je n’ai plus de moyen pour me rendre à Ottawa », confirme-t-elle. Plus possible de prendre l’avion de Gaspé à Québec, pour ensuite prendre un autre vol jusqu’à Ottawa. En voiture, ce trajet prend douze heures — sans s’arrêter une seule fois en chemin.

«Comme entreprise, Air Canada, c’est une honte ! D’avoir agi de cette façon-là, sans aucun respect ni pour les gens des régions ni pour les différents paliers de gouvernement, pour moi c’est épouvantable.» — Diane Lebouthillier

Sa voisine de circonscription, la bloquiste Kristina Michaud, est dans le même bateau. Air Canada a annoncé mardi qu’elle cessait aussi indéfiniment les liaisons entre Mont-Joli et Montréal. Le retour d’Ottawa vers la circonscription devra désormais se faire en voiture, ce qui nécessite huit heures de route ininterrompues. « Il se peut que je ne revienne pas aussi souvent, malheureusement », reconnaît la députée d’Avignon–Mitis–Matane–Matapédia.

Sa collègue bloquiste Marilène Gill, sur la Côte-Nord, faisait déjà le trajet de douze heures en voiture vers Ottawa, car les vols d’Air Canada étaient trop souvent annulés. Mais elle perd maintenant le vol de Sept-Îles vers Wabush, au Labrador, qui lui permettait d’aller à Fermont à l’extrémité de sa circonscription de Manicouagan. La fin du service aérien dans sa région est « un coup dur » pour les résidents. « Pour les citoyens, c’est un service essentiel. C’est la façon de nous désenclaver. »

La députée bloquiste d’Abitibi–Baie-James–Nunavik–Eeyou, Sylvie Bérubé, est tout aussi déçue. Air Canada a transporté 20 800 passagers à Val-d’Or l’an dernier. Des médecins spécialistes, des gens d’affaires, des travailleurs miniers, des professeurs. « Tout le monde est touché », dénonce-t-elle. Les Abitibiens sont d’autant plus isolés que le transport par autobus interrégional est lui aussi suspendu, depuis le début de la pandémie.

Une solution canadienne ou québécoise ?

La ministre Lebouthillier assure qu’elle a déjà soulevé le dossier avec le ministre fédéral des Transports, Marc Garneau. « Une chose est certaine, et ce n’est pas discutable, c’est que les régions ont le doit de recevoir le même service qu’ailleurs », insiste-t-elle.

Mme Lebouthillier suggère que d’autres transporteurs aériens pourraient prendre le relais afin de desservir les régions abandonnées par Air Canada. Le ministre québécois des Transports, François Bonnardel, a suggéré cette même idée jeudi. Il a également évoqué la possibilité que Québec créé sa propre entreprise aérienne, selon Radio-Canada. La ministre Lebouthillier n’a pas commenté cette éventualité.

Mais elle a fait valoir qu’Air Canada suspend également son service dans les Maritimes et dans certaines régions de l’Ontario. La solution devra donc être canadienne, et pas uniquement québécoise, à son avis. « Parce que le dossier est pancanadien. »

Les trois élues bloquistes ont invité Ottawa à respecter la solution préconisée par le gouvernement québécois et déploré que le fédéral n’ait pas insisté, en amont, pour qu’Air Canada maintienne ses services en régions en échange de l’aide financière qui lui a été octroyée pendant la pandémie. « Le gouvernement fédéral aurait dû intervenir bien avant qu’Air Canada coupe ses services », a reproché la députée Michaud.

Le bureau du ministre fédéral des Transports, Marc Garneau, ne s’est pas prononcé sur l’idée de son homologue québécois, ni sur la possibilité de venir en aide à Air Canada ou aux petits transporteurs régionaux afin d’assurer le maintien du service aérien. « Cette décision d’Air Canada est très décevante pour les résidents des communautés touchées par ces réductions de service », a commenté l’équipe de M. Garneau. « Nous comprenons les conséquences que ces réductions de service auront sur de nombreux Canadiens à travers le pays et nous continuerons de travailler avec nos partenaires, les compagnies aériennes et les aéroports en cette période difficile. »

La Fédération des Chambres de commerce du Québec, l’Union des municipalités du Québec, le Réseau québécois des aéroports et l’Alliance de l’industrie touristique du Québec ont annoncé la création d’une « cellule de crise » qui tentera de trouver des solutions rapidement. Ces regroupements entendent discuter avec les ministres Garneau et Bonnardel dans les prochaines semaines.

LA UNE : Photo: Darryl Dyck La Presse canadienne Le bureau du ministre fédéral des Transports, Marc Garneau, ne s’est pas prononcé sur la possibilité de venir en aide à Air Canada ou aux petits transporteurs régionaux afin d’assurer le maintien du service aérien.