Chemin des Chalets aux Îles : des compensations financières demandées

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Huit propriétaires du chemin des Chalets, aux Îles-de-la-Madeleine, ont fait appel aux services d’un avocat dans le but d’être indemnisés financièrement pour quitter leur propriété.

Pour l’instant, aucun recours judiciaire n’a été déposé devant les tribunaux, mais la possibilité d’intenter un recours collectif ou une poursuite en dommages est envisagée, indique l’avocat des propriétaires.

On espérait, et on espère toujours, peut-être de façon de moins en mois optimiste, de pouvoir régler le dossier avec la Municipalité sans avoir recours aux tribunaux, affirme Me Christopher Atchison.

La Municipalité des Îles-de-la-Madeline a demandé aux 42 propriétaires du secteur ouest du chemin des Chalets de démolir ou de déménager leur chalet d’ici le 30 novembre, dans la foulée des dommages causés par la tempête post-tropicale Dorian en septembre 2019.

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En raison de l’érosion côtière, certains chalets se sont retrouvés directement sur la plage après le passage de Dorian (archives, septembre 2020). PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE

L’avocat des propriétaires estime que la Municipalité n’a pas le pouvoir législatif d’exiger le départ des propriétaires en place.

J’ai eu des communications avec les procureurs qui représentent la Ville et ils m’ont confirmé que la Municipalité n’a pas l’habileté législative ou réglementaire pour adopter un règlement pour fermer le chemin des Chalets, affirme Me Atchison. Les gens [qui ont déjà démoli ou déplacé leur chalet] ont agi conformément à un délai émis par la Municipalité alors qu’elle n’a pas la compétence même pour fermer le chemin des Chalets.

L’avocat du groupe de propriétaires soutient que la gestion municipale du dossier ne tourne pas rond depuis 2011, année où la Municipalité a indiqué qu’elle n’investirait plus dans l’entretien du chemin et qu’elle allait éventuellement procéder à [sa] fermeture.

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Christopher Atchison représente les propriétaires de huit résidences secondaires du chemin des Chalets. PHOTO : COURTOISIE

La Municipalité a publié des communiqués, ce n’était pas résolutions, des ordonnances ni des règlements adoptés ni, évidemment, des lois provinciales, argue Me Christopher Atchison. La Municipalité publie des communiqués qui sont draconiens pour les propriétaires sans que ces communiqués aient force de loi. Évidemment, ça crée une confusion parmi les résidents.

L’avocat soutient par ailleurs que cette confusion a provoqué des pertes réelles pour ses clientsIl y en a un en particulier qui n’était pas au fait des intentions de la Municipalité, précise Me Atchison, qui a obtenu des permis municipaux pour des travaux après 2011, soit après que la Municipalité ait dit qu’elle allait éventuellement fermer le chalet, et il a investi des centaines de milliers de dollars dans des immeubles sur le chemin des Chalets. Semble-t-il que la main droite ne sait pas ce que fait la main gauche.

«Avec les tergiversations et la confusion créées par la Municipalité, et les gestes posés ou non posés par les gens en fonction de ces tergiversations-là, on pense qu’une compensation devrait être accordée.» – Christopher Atchison, avocat

Me Atchison soutient que ces clients ne remettent pas en question les problèmes d’érosion et de submersion côtières qui touchent le chemin des Chalets, mais bien sa gestion municipale.

Mes clients sont très au courant de la problématique de fond, affirme Me Atchison. On n’est pas dans le déni du réchauffement climatique et de la remontée des eaux, ce sont des facteurs reconnus, mais on a vraiment l’impression qu’on n’a pas été traité correctement par la Ville.

Réponse de la Municipalité

Invitée à réagir aux démarches juridiques amorcées par le groupe de huit propriétaires, la coordonnatrice des communications de la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine a indiqué qu’exceptionnellement, la Municipalité ne commentera pas le dossier et ne répondra pas aux demandes d’entrevue, puisque le dossier est en voie d’être judiciarisé.

Toutefois, le maire avait répondu aux questions de Radio-Canada sur le sujet, un peu plus tôt cette semaine. Jonathan Lapierre avait alors rappelé que la Municipalité se doit d’appliquer les avis ministériels dans le dossier.

À partir du moment où le Ministère nous impose d’agir sous peine d’amendes sévères, imputables à l’ensemble de la communauté des Îles, nous, en bons gestionnaires, on n’a pas le choix d’agir, a indiqué Jonathan Lapierre. Le citoyen peut contester à tout moment, mais nous, évidemment, on se défend.

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Plusieurs résidences ont été déplacées au cours de l’été 2020 (archives, septembre 2020). PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE

Des recommandations ministérielles

Dans un avis technique final datant du 3 mars 2020, le ministère de la Sécurité publique note que l’entièreté du secteur du chemin des Chalets […] est jugée en situation de danger imminent en regard des aléas d’érosion et de submersion côtières.

L’avis technique recommande de procéder au retrait permanent des bâtiments et à la fermeture du chemin des Chalets.

Ce retrait est jugé par Québec comme la seule solution jugée sécuritaire qui permet la réduction des risques liés à l’érosion et à la submersion côtières à cet endroit et d’éviter que se reproduise un sinistre qui porterait atteinte à la sécurité des personnes et des intervenants d’urgence ainsi qu’à l’intégrité des biens , peut-on lire dans l’avis technique.

Cet avis précise que la côte du secteur ouest du chemin des Chalets a subi un recul moyen de l’ordre de 38,70 mètres entre 1963 et 2019.

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Selon le ministère de la Sécurité publique, la côte du secteur ouest du chemin des Chalets a subi un recul moyen de l’ordre de 38,70 mètres en 55 ans, soit un taux d’érosion de 0,70 mètre par année. PHOTO : UQAR ET FOND D’IMAGERIE DU GOUVERNEMENT DU QUÉBEC (AVIS TECHNIQUE FINAL DU MINISTÈRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE)

De son côté, le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques considère désormais que le secteur ouest du chemin des Chalets est situé dans le littoral, puisque la bande riveraine de 10 mètres, mesurée à partir de la ligne des hautes eaux, est majoritairement absente dans le secteur.

Le Ministère a avisé la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine, le 4 octobre 2019, qu’ aucun système de traitement et d’évacuation des eaux usées d’origine domestique ne peut être installé ou réparé.

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Une quarantaine de chalets ont été endommagés par le passage de Dorian aux Îles-de-la-Madeleine (archives, septembre 2019). PHOTO : RADIO-CANADA / BRUNO LELIÈVRE

Assumer sa responsabilité et rester sur les lieux

Dans une lettre envoyée aux propriétaires du secteur concerné le 17 août 2020, la Municipalité a réitéré la position qu’elle avait présentée lors d’une rencontre organisée le 16 septembre 2019 à savoir qu’il devient impossible de conserver un chalet existant, en regard des avis ministériels.

La missive contient toutefois une note sur la possibilité, pour les propriétaires concernés, de ne pas se conformer aux avis ministériels.

Notez que si vous faites le choix de passer outre aux recommandations des ministères concernés, il vous appartiendra d’assumer la responsabilité liée à cette décision et, éventuellement, aux dommages que vos biens ou des tiers pourraient subir en conséquence, peut-on lire dans la lettre.

Au moment de publier ces lignes, la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine n’avait pas été en mesure de fournir le nombre de propriétaires n’ayant pas encore démoli ou déplacé leur résidence secondaire, à deux semaines de l’échéance fixée.

LA UNE : Certains propriétaires refusent de déplacer ou démolir leur chalet, même si le secteur a été submergé lors du passage de Dorian en septembre 2019 (archives, septembre 2020). PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE