Île Brion : une chasse scientifique boudée et complexe à organiser

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La première chasse scientifique au phoque gris sur l’île Brion représente un défi d’organisation, particulièrement en période de pandémie. Le principal acheteur de viande de loup-marin refuse d’ailleurs d’y prendre part.

C’est une opération, avec la pandémie, qui va être encore plus complexe que ça ne l’aurait été d’habitude, déjà que les sorties de chasse, c’est toujours compliqué!, lance le directeur de l’Association des chasseurs de phoque intra-Québec, Gil Thériault.

La chasse scientifique au phoque gris, autorisée en octobre par Québec, pourrait s’ouvrir d’ici la fin du mois à l’île Brion si Dame nature, les chasseurs et les scientifiques arrivent à se coordonner.

M. Thériault explique que la période de chasse aux jeunes phoques gris est optimale durant une période assez limitée.

Les chasseurs disposent d’une fenêtre de deux à trois semaines à partir de la fin janvier pour capturer les jeunes phoques, au moment où ils sont sevrés, mais avant qu’ils entrent à l’eau. Sinon ça devient très compliqué de les chasser, explique Gil Thériault. Et en plus, il faut qu’il fasse beau en plus durant cette période-là pour qu’on puisse sortir en mer.

En plus de ces contraintes habituelles, Gil Thériault explique que les chasseurs doivent cette année se coordonner avec une équipe de scientifiques de l’Université Laval qui viendra observer la chasse, permise sur une section limitée de la plage de l’île Brion.

Dans un contexte de pandémie, on doit s’organiser avec des gens de l’extérieur, en zone rouge, qui doivent venir aux Îles, qui doivent affréter un bateau, explique Gil Thériault. Est-ce qu’ils auront une quarantaine à respecter, pas de quarantaine avec des permissions spéciales?

«Ça rend encore les choses un peu plus compliquées qu’elles le seraient déjà naturellement. C’est assez rock’n’roll!» – Gil Thériault, directeur de l’Association des chasseurs de phoque intra-Québec

L’Association des chasseurs de phoque intra-Québec affirme que les discussions en cours avec le ministère de l’Environnement laissent croire que deux bateaux pourront se rendre à l’île Brion sous le regard des scientifiques et que près de 2000 phoques pourraient y être abattus.

Au moment de publier ces lignes, le ministère de l’Environnement n’avait pas encore précisé les modalités de la chasse scientifique à l’île Brion.

Réjean Vigneau ne veut pas se mêler du dossier

Cette chasse scientifique est boudée par le plus important acheteur de viande de loup-marin des Îles-de-la-Madeleine, le copropriétaire de la boucherie Côte à Côte, Réjean Vigneau, également chasseur de phoque.

Ce dernier garde un souvenir amer d’une amende de plus de 2625 $ qu’il a reçue pour avoir chassé sur l’île Brion en 2016.

Réjean Vigneau refuse de participer à cette chasse scientifique et d’acheter la viande qui en découlera.

«Je ne veux pas me mêler de ce dossier-là pour plusieurs raisons. J’ai des cicatrices qui ne sont pas encore fermées avec le ministère de l’Environnement.» – Réjean Vigneau, propriétaire de la boucherie Côte à Côte et chasseur de phoque

M. Vigneau va plutôt aller chasser du côté de l’île Pictou en Nouvelle-Écosse. Le boucher, qui espère capturer entre 2000 et 2500 phoques gris cette année pour approvisionner le marché madelinot et québécois, attend la confirmation qu’il pourra poser le pied sur la petite île néo-écossaise, malgré la pandémie.

Total Océan pourra-t-elle récupérer les peaux lardées?

Si la viande des phoques issue de la chasse scientifique menée sur l’île Brion ne trouve pas preneur, les peaux lardées pourraient être récupérées par Total Océan, une entreprise madelinienne qui souhaite commercialiser l’huile riche en oméga-3 du loup-marin à des fins pharmaceutiques.

Toutefois, Total Océan devra être en mesure d’entreposer dans de bonnes conditions les peaux avant de pouvoir les traiter.

C’est que l’usine de Havre-aux-Maisons attend toujours un distillateur moléculaire, un équipement nécessaire pour mettre en marché l’huile de phoque.

 L’appareil, dont l’arrivée a été retardée en raison de la pandémie, devrait être livré en mars.

Total Océan évalue ces jours-ci sa capacité de stockage et devrait pouvoir préciser la semaine prochaine combien de peaux lardées elle sera en mesure de conserver avant la mise en marche du distillateur moléculaire.

LA UNE : La colonie de phoques gris de l’île Brion, une réserve écologique à 16 kilomètres au large des Îles-de-la-Madeleine, est évaluée à au moins 10 000 individus (archives). PHOTO : ISTOCK / IAN DYBALL