Pêches: la lutte contre les engins fantômes s’accélère

Publicité

Articles similaires

Capitaine Acadie prend son envol à Caraquet

La municipalité de Caraquet et Bedecomics ont officiellement dévoilé,jeudi,...

Comment se porte l’Acadie du Québec?

NDLR: En 2014, le Québec et le Maine ont...

Une religieuse ayant oeuvré en Acadie deviendra la 15e sainte canadienne

Qui aurait pu imaginer qu’un jour, une sainte émergerait...

Le homard géant de Shediac ne sera pas repeint en bleu

Les personnes qui auraient voulu voir l’œuvre de Winston...

Les projets visant à donner une deuxième vie aux matériaux de pêche se multiplient au Canada Atlantique, des initiatives dont l’objectif est de réduire la pollution par le plastique dans les océans.

La pêche commerciale représente une importante source de pollution au Canada en raison de la quantité importante d’engins de pêche perdus ou abandonnés en mer. Il en résulte que chaque année de nombreux casiers, filets et cordages – désigné comme étant des engins fantômes – restent en mer.

Conscient de la problématique et de la menace qu’elle représente pour l’industrie des pêches au Canada, le fédéral a annoncé en 2019 la mise sur pied du Fonds pour les engins fantômes, une initiative de 8,3 millions $ afin «d’aider l’industrie et les groupes environnementaux à trouver et éliminer ces engins fantômes de manière responsable», explique Élise Lavigne, directrice aux programmes nationaux pour Pêches et Océans Canada.

En 2020, les projets financés par le Fonds ont permis de retirer 63 tonnes des eaux côtières canadiennes, soit l’équivalent de 11 éléphants. Environ 86% des engins retirés de l’eau étaient des casiers de crabes ou de homard. Plus de trois kilomètres de cordes de pêche ont aussi été récupérés.

En plus des efforts visant à récupérer le matériel perdu, plusieurs projets pilotes visent à donner une nouvelle vie à ces déchets.

Coastal Action, une organisation non gouvernementale néo-écossaise, fait partie des groupes qui luttent contre la pollution engendrée par les activités de pêche commerciale.

En février, l’organisme a installé des bacs de récupération pour de vieux cordages de pêche sur neuf quais dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse. Ce projet pilote, mené en partenariat avec les entreprises néo-écossaises Sustane Technologies et GoodWood Plastic, vise à transformer ces cordages en diesel synthétique.

«En un mois seulement, nous avons déjà récupéré six tonnes de cordes et il va bientôt falloir retourner vider les bacs une deuxième fois», dit Ariel Smith, responsable du projet chez Coastal Action.

D’après la Fishing Gear Coalition of Atlantic Canada, 11 500 tonnes de cordages de pêche se retrouvent chaque année dans les sites d’enfouissement de la Nouvelle-Écosse.

L’objectif du partenariat avec Sustane Technologies, dit Mme Smith, vise à démontrer qu’il est possible de faire les choses autrement, pas qu’en Nouvelle-Écosse, mais partout au pays.

C’est le deuxième projet du genre que mène Coastal Action. GoodWood Plastic vient de terminer un premier projet pilote avec l’ONG afin de transformer des cordages de pêche en planches faites de plastique. Ces pièces de «bois» ont été utilisées afin de remplacer les butoirs du quai fédéral d’Eastern Passage, près d’Halifax, en Nouvelle-Écosse.

«On a réussi à recycler près de 52 km de cordages de pêche grâce à ce projet pilote, explique Mike Chassie, copropriétaire de GoodWood Plastics. L’espoir c’est que les gouvernements ou d’autres exploitants de quais utilisent un jour nos produits comme une alternative plus écologique au bois traité chimiquement sous pression habituellement utilisé sur les quais.»

Des opérations de nettoyage au N.-B.

Underwater-Lobster-Trap
LA LUTTE CONTRE LES ENGINS DE PÊCHE FANTÔME A COMME OBJECTIF D’ÉLIMINER L’ÉQUIPEMENT DE PÊCHE ABANDONNÉ DANS L’OCÉAN ET DE PRÉVENIR LA PERTE D’ENGINS DE PÊCHE. -GRACIEUSETÉ

Tout comme Coastal Action, l’Union des pêcheurs des Maritimes (UPM) mène elle aussi plusieurs projets afin de retrouver des engins de pêche perdus sur les fonds marins.

Dans le cadre d’un projet financé par le Fonds de la nature du Canada pour les espèces aquatiques en péril, l’UPM tente de voir s’il est possible d’adapter différentes méthodes de cartographie sonar afin de faciliter l’identification des engins de pêche fantôme sur les fonds marins.

«Personne n’aime avoir des casiers au fond de l’eau, c’est un problème pour les pêcheurs, la ressource et l’environnement», dit Alexandre Mourant, biologiste chez Homarus, un organisme de recherche à but non lucratif créé par l’UPM.

Grâce à l’expertise des pêcheurs, l’organisme a aussi développé un grappin expérimental afin de faciliter la récupération des casiers perdus.

«On mise beaucoup sur l’expertise des pêcheurs parce qu’ils ont tous leur propre méthode, leurs propres grappins. En parlant avec eux, on a rassemblé tout ça afin de développer un prototype. Ce grappin expérimental a été testé l’été dernier pour récupérer des casiers et nous avons eu des résultats prometteurs», relate M. Mourant.

Malheureusement, dit Ariel Smith, les casiers arrivés à la fin de leur vie utile retrouvés lors d’opérations de nettoyage sont toutefois plus difficiles à recycler.

Une entreprise de Yarmouth, en Nouvelle-Écosse, tente toutefois de faire en sorte que ce ne soit plus le cas à l’avenir. The Lobster Trap Company tente en effet de développer des casiers à homard plus durables. Fabriqués à partir de plastiques recyclés, ces pièges peuvent être récupérés à la fin de leur vie utile afin d’en faire de nouveaux casiers.

Des microplastiques retrouvés partout en Atlantique

Diminuer la présence des engins fantômes des fonds marins est plus que jamais nécessaire vu leur contribution à la présence de microplastiques dans les océans, ajoute Ariel Smith.

En effet, un projet de recherche mené par Coastal Action a réussi à démontrer la présence de ces contaminants dans tous les échantillons d’eau de surface et de sédiments prélevés le long des côtes de plusieurs communautés du Canada Atlantique.

«On souhaitait amasser des données sur les genres et la quantité de microplastiques retrouvées dans ces environnements marins proches de la côte, dit Ariel Smith. Le genre de plastique que nous avons retrouvé est directement relié à la problématique des engins fantômes parce qu’il y a beaucoup de fils et des fibres provenant des cordages de pêche.»

D’ici 2023, Coastal Action tentera aussi de quantifier la présence et l’impact des micros plastiques présents dans le Golf Saint-Laurent et le bassin versant du fleuve Saint-Jean. L’étude vise notamment à mesurer l’impact de ces contaminants sur les moules communes, une espèce marine importante sur les plans écologique et économique.

 

Par JUSTIN DUPUIS

LA UNE : EN FÉVRIER, COASTAL ACTION A INSTALLÉ DES BACS DE RÉCUPÉRATION POUR DE VIEUX CORDAGES DE PÊCHE SUR NEUF QUAIS DANS LE SUD-OUEST DE LA NOUVELLE-ÉCOSSE. CE PROJET PILOTE VISE À TRANSFORMER LES CORDES EN DIESEL SYNTHÉTIQUE. – GRACIEUSETÉ