Les Madelinots tournent le dos au Conseil régional de l’environnement

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Faisant valoir l’importance de doter les territoires gaspésien et madelinot d’organisations distinctes, le milieu insulaire ne compte pas nommer de remplaçant, car il estime que le CREGIM (Conseil régional de l’environnement de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine) ne dessert pas adéquatement l’archipel.

Le Madelinot Serge Bourgeois a remis sa démission à titre d’administrateur du CREGIM le 8 novembre dernier. Le directeur des projets du développement du territoire à la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine siégeait au conseil d’administration du CREGIM à titre de citoyen depuis 2019.

Serge Bourgeois se dit très déçu de son expérience à titre d’administrateur. Il affirme que la majorité sinon la totalité des administrateurs madelinots qui ont siégé à la table du CREGIM avant lui partagent son opinion.

Il précise toutefois que sa démission n’est nullement « une attaque à l’organisation, ses employés ou ses administrateurs », mais qu’il en veut plutôt à la « structure de l’organisme dans un territoire aussi vaste ».

CREGIM est absent physiquement sur le territoire des Îles, il a très peu d’impact","text":"Le CREGIM est absent physiquement sur le territoire des Îles, il a très peu d’impact"}}">Le CREGIM est absent physiquement sur le territoire des Îles, il a très peu d’impact, estime l’administrateur démissionnaire. La Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine ont des enjeux extrêmement différents les uns des autres. C’est une organisation de concertation qui peut difficilement nous rejoindre et nous être utile dans sa forme actuelle.

«C’est une perte de temps pour nous et pour la Gaspésie d’être à la même table. C’est un défi énorme de faire de la concertation sur un territoire aussi vaste, surtout en environnement.» – Une citation de :Serge Bourgeois, ex-administrateur du CREGIM

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L’ex-administrateur du CREGIM Serge Bourgeois est un intervenant clé pour tous les dossiers liés à l’aménagement territorial dans l’archipel. Directeur des projets du développement du territoire à la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine, il coordonne aussi les travaux du comité consultatif sur les terres publiques et l’environnement. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE

Serge Bourgeois souligne qu’il est difficile de se sentir interpellé par une réunion qui se déroule à 250 kilomètres de l’archipel et qui aborde souvent l’état du caribou, du chevreuil ou du saumon, des espèces qui ne sont même pas présentes sur le territoire madelinot.

Non seulement on ne se sent pas beaucoup interpellé, mais on n’a pas souvent l’expertise pour participer aux discussions de façon intelligente, explique Serge Bourgeois. C’est pénible et l’inverse est aussi vrai pour les Gaspésiens par rapport aux enjeux madelinots. On n’a plus de temps à perdre avec ça!

Les Madelinots veulent leur propre instance

Le Comité consultatif sur les terres publiques et l’environnement (CCTPE), qui regroupe des élus et des représentants d’organismes madelinots, a décidé de ne pas nommer de remplaçant au conseil du CREGIM, comme c’était la tradition. Selon la lettre de démission de Serge Bourgeois, le comité considère que la présence des Madelinots au conseil d’administration n’est pas justifiée.

Le CCTPE demande même à la Communauté maritime des Îles-de-la-Madeleine de plaider auprès des instances gouvernementales la nécessité de reconnaître le territoire madelinot et gaspésien de façon distincte, puisque la structure actuelle n’a jamais répondu aux attentes des Madelinots.

Il est temps de revendiquer encore que les îles de la Madeleine soient considérées comme un territoire distinct de la Gaspésie, estime Serge Bourgeois. CREGIM, afin qu’ils puissent avoir des budgets spécifiques associés à nos enjeux plutôt que de passer par un organisme de la Gaspésie.","text":"Il faut que le ministère de l’Environnement reconnaisse nos organismes locaux, au même titre que le CREGIM, afin qu’ils puissent avoir des budgets spécifiques associés à nos enjeux plutôt que de passer par un organisme de la Gaspésie."}}">Il faut que le ministère de l’Environnement reconnaisse nos organismes locaux, au même titre que le CREGIM, afin qu’ils puissent avoir des budgets spécifiques associés à nos enjeux plutôt que de passer par un organisme de la Gaspésie.

«Il est important tant pour nous et pour les Gaspésiens qu’il y ait deux tables distinctes.» – Une citation de :Serge Bourgeois, ex-administrateur du CREGIM

Serge Bourgeois fait valoir que plusieurs organismes œuvrent déjà dans le domaine de l’environnement dans l’archipel, dont la Société de conservation des Îles-de-la-Madeleine, le Comité ZIP et Attention FragÎles. Ce dernier organisme a d’ailleurs été mis sur pied en 1988, avant même la création du CREGIM en 1995.

Contrairement au CREGIM, les organismes madelinots n’ont pas de financement de base récurrent provenant du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques.

Réaction de la directrice du CREGIMConseil régional de l’environnement Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine

La directrice du Conseil régional de l’environnement Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine, Caroline Duchesne, se dit déçue de la démission de Serge Bourgeois, mais affirme tout de même comprendre les motivations des Madelinots.

ans que les intervenants des Îles-de-la-Madeleine désirent avoir leurs propres organismes, leur propre ministère","text":"Ça fait plus de 20ans que les intervenants des Îles-de-la-Madeleine désirent avoir leurs propres organismes, leur propre ministère"}}">Ça fait plus de 20 ans que les intervenants des Îles-de-la-Madeleine désirent avoir leurs propres organismes, leur propre ministère, affirme Mme Duchesne, directrice du CREGIM depuis 21 ans. Quand on a des projets régionaux, c’est difficile d’intégrer les Îles, alors qu’il y a Attention FragÎles qui performe déjà sur le territoire. L’intérêt des Madelinots n’est pas là quand on parle de projets régionaux et on le comprend.

Toutefois, Caroline Duchesne rappelle que c’est le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques qui établit le territoire desservi par le CREGIM et que les aspirations d’indépendance territoriale des Madelinots relèvent de la sphère politique.

On comprend très bien ce que les Îles-de-la-Madeleine recherchent, mais, pour l’instant, notre mandat signé avec le ministère de l’Environnement, c’est de desservir le territoire Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, explique Caroline Duchesne. Tant que ça sera écrit cela dans la convention, on se doit de desservir ce territoire-là, ce choix-là ne m’appartient pas.

Elle précise tout de même que le conseil d’administration du CREGIM pourrait demander au Ministère de se pencher une fois pour toutes sur la question. Ça va prendre une rencontre des administrateurs pour décider de la suite des choses, explique Mme Duchesne.

Interpellé par Radio-Canada, le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques n’a pas souhaité commenté le dossier.

Les tables Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine se raréfient

La directrice du CREGIM, Caroline Duchesne, note au passage que plusieurs autres instances qui desservaient jadis la péninsule gaspésienne et l’archipel madelinot ont été scindées au fil du temps.

Ça s’est fait dans d’autres domaines, dont la culture avec Culture Gaspésie et Arrimage aux Îles, ou en agroalimentaire avec Gaspésie Gourmande et Le bon goût frais des Îles, cite-t-elle en exemple.

L’ex-administrateur du CREGIM Serge Bourgeois abonde dans le même sens.

Depuis la disparition de la Conférence régionale des élus, les tables de concertation forcées entre nos deux territoires sont de plus en plus rarissimes, ajoute M. Bourgeois. CREGIM est probablement l’une des dernières, parce que les gens se sont aperçus que le mode de fonctionnement Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine n’était pas nécessairement optimal et productif.","text":"Je dirais même que le CREGIM est probablement l’une des dernières, parce que les gens se sont aperçus que le mode de fonctionnement Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine n’était pas nécessairement optimal et productif."}}">Je dirais même que le CREGIM est probablement l’une des dernières, parce que les gens se sont aperçus que le mode de fonctionnement Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine n’était pas nécessairement optimal et productif.

Serge Bourgeois rappelle que les Madelinots ont plaidé pour la création d’organismes distincts dès la création du CREGIM, mais il estime que le décret d’insularité adopté en 2016 par le gouvernement Couillard représente aujourd’hui une carte de plus dans le jeu des Madelinots pour faire valoir leurs revendications.

Ce décret exigeait que « chaque ministère […] module ses interventions afin de tenir compte des enjeux et des contraintes particulières de l’agglomération des Îles-de-la-Madeleine ainsi que de son caractère unique en raison de son insularité et de son isolement lié à sa position géographique au centre du golfe du Saint-Laurent ».

PAR Isabelle Larose

LA UNE : Les Madelinots déplorent « le très faible impact » du CREGIM dans l’archipel et font valoir que les enjeux environnementaux des Îles sont différents de ceux de la Gaspésie (archives). PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE