Îles-de-la-Madeleine: la desserte aérienne irrite les voyageurs

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Les problèmes de retards du transporteur aérien Pascan provoquent de plus en plus de maux de tête aux utilisateurs de la compagnie aux Îles-de-la-Madeleine, à tel point qu’une médecin spécialiste envisage à contrecœur de stopper sa pratique dans la région.?

«J’adore ma job aux îles, mais depuis entre six mois et un an, il y a tellement d’irritants et de frustration que je n’ai plus de plaisir à y aller», confie la Dre Chantal Delorme, ophtalmologiste qui pratique 21 semaines par année aux Îles-de-la-Madeleine depuis une dizaine d’années.

Volant sur les ailes de Pascan aux deux semaines, la spécialiste estime faire partie de leurs clients les plus assidus. Or, elle accumule les plaintes au transporteur depuis quelques mois. Selon elle, les horaires de la «très grande majorité» des vols vers ou au départ des îles sont chamboulés, parfois en raison de facteurs incontrôlables comme la météo, mais trop souvent en raison de problèmes mécaniques ou de main-d’œuvre.

«J’ai fait une plainte quand je considère que c’est un manque de respect à la clientèle. J’ai des patients qui ont été annulés deux fois à cause de Pascan. Des gens en attente de chirurgie ou qui attendaient pour être vus depuis deux ans», explique l’ophtalmologiste qui déplore le manque de communication.

«On m’a déjà donné un numéro de téléphone où appeler pour savoir si mon vol était maintenu un dimanche. Après 50 minutes d’attente, un message finit par me dire qu’on n’est pas sur les heures d’ouverture et de rappeler entre lundi et vendredi. C’est ridicule.»

Un plan qui ne réglera pas tout

Le député des Îles-de-la-Madeleine, Joël Arseneau, affirme avoir reçu de nombreux témoignages comme celui de la Dre Delorme. Plusieurs résidents de sa circonscription qui doivent se déplacer vers Québec pour des traitements médicaux ont aussi subi les affres des déboires de Pascan. (voir le texte suivant celui-ci)

«On a une dame, la veille d’un examen important, on annule son vol et les deux suivants. Et le pire, c’est que c’est la journée où le premier ministre était aux Îles pour annoncer ce qu’il qualifie de meilleur plan pour l’aviation régionale», raconte le député péquiste à propos de la stratégie de relance qui était attendue depuis deux ans et qui consiste finalement à des vols à 500$.

L’annonce de François Legault a d’ailleurs laissé un goût amer aux Madelinots qui doivent voler sur le monopole de Pascan, n’ayant aucune autre alternative depuis le départ d’Air Canada, qui n’offre plus que des vols en été depuis 2020.

«Les vols à 500$, ça ne changera rien sur la qualité du service», soupire Chantal Renaud, qui accompagne son mari à Québec depuis deux ans pour des traitements en oncologie. «Chaque fois qu’on atterri, on entend leur fameux message : ‘’Merci d’avoir voyagé avec Pascan’’. On le fait parce qu’on a pas le choix», ironise la dame.

Même le maire des Îles-de-la-Madeleine Jonathan Lapierre s’est buté à des problèmes pour un vol cette semaine. Sa réservation n’avait tout simplement pas été enregistrée dans le système informatique de la compagnie a-t-il raconté dans une publication Facebook visant à saluer le travail de l’agente qui lui a finalement créé une réservation sur place.

Pas de réponse

La direction de Pascan n’a pas donné suite aux multiples demandes d’entrevue du Journal.

Certaines informations laissent toutefois croire que la compagnie souffre notamment de problèmes de main-d’œuvre. La reprise des activités dans le domaine de l’aviation a mené au départ de plusieurs pilotes vers des plus gros transporteurs selon ce que la compagnie a indiqué à d’autres médias au cours des derniers mois.

La question de la fiabilité des appareils et des difficultés d’accès à des pièces de remplacement fait aussi partie des raisons expliquant les problèmes selon divers intervenants.

INQUIÉTUDE POUR DES MADELINOTS PRIS EN OTAGE

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Joël Arseneau, Député des Îles-de-la-Madeleine. PHOTO D’ARCHIVES

Des Madelinots devant voyager vers Québec pour des traitements médicaux déplorent être «pris en otage» du mauvais service de Pascan qui les force à partir quelques jours d’avance pour s’assurer de ne pas rater leurs rendez-vous.

«On ne prend plus de chance, on part une journée ou deux à l’avance. Mais partir l’avant-veille d’un rendez-vous, c’est des nuits à l’hôtel de plus, de la nourriture, c’est des dépenses de plus qu’on a à cause d’eux autres», dénonce Chantal Renaud, qui accompagne son mari pour des traitements d’oncologie. «Ça rajoute au stress de ta maladie.»

Une autre résidente des îles a confié au Journal que sa mère a récemment raté une opération attendue à Québec en raison d’annulation de trois vols consécutifs.

«Elle a un cancer, ça fait un mois et demi qu’on attend, on a hâte à cette fameuse date et c’est trois vols de suite qui ne partent pas», s’indigne la dame qui souhaite demeurer anonyme à la demande de sa mère malade. «Elle est déjà affectée par la maladie, on ne veut pas avoir plus de problèmes avec eux, surtout que c’est la seule compagnie. On est cloîtré sur notre île.»

Le CISSS inquiet

La situation est telle que le CISSS des Îles-de-la-Madeleine a confirmé au Journal avoir abordé le problème directement avec la direction de Pascan. Le CISSS a décliné une demande d’entrevue pour ne pas nuire à ces discussions, mais a confié être confiant pour la suite.

«Les discussions sont très encourageantes et des suivis seront faits pour s’assurer du succès de ce partenariat», souligne la porte-parole du CISSS, Nathalie Cyr.

Des sources indiquent toutefois au Journal que les dirigeants du CISSS craignent pour leurs patients, mais redoutent aussi un problème d’attractivité de la main-d’œuvre de l’extérieur si le problème ne se règle pas rapidement.

«Il y a une crainte de perdre des gens. Et des gens avec une expertise», souligne le député péquiste Joël Arseneau.

LA UNE : L’ophtalmologiste Chantal Delorme, de la région de Québec, pratique 21 semaines par année aux Îles-de-la-Madeleine. PHOTO STEVENS LEBLANC

PAR PIERRE-PAUL BIRON