La transition vers les engins de pêche sans cordage est amorcée

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L’adoption de nouveaux casiers sans cordage par les crabiers, présentée comme un moyen de préserver les baleines des empêtrements, suscite de grands espoirs. Les essais en haute mer se multiplient et la technologie commence à faire ses preuves.

Dans la zone 12 du sud du golfe Saint-Laurent, 21 capitaines pourront mettre à l’essai cette nouvelle technologie ce printemps. Chaque pêcheur a droit à 50 casiers expérimentaux qui pourront être déposés dans les zones fermées en raison de la présence de baleines. Quand vient le temps de récupérer le casier, il suffit à l’équipage d’utiliser une application pour envoyer un signal acoustique qui déclenche la libération de bouées attachées à un câble et les fait remonter à la surface.

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Sans cordage suspendu en permanence dans la colonne d’eau, le risque d’empêtrement diminue drastiquement. L’enjeu est vital à la survie de la baleine noire l’Atlantique Nord. L’espèce, dont il ne resterait plus que 336 représentants, est désormais en danger critique d’extinction.

L’Association des crabiers acadiens et l’Association des pêcheurs professionnels crabiers acadiens (APPCA) se sont associées à ce projet pilote financé par Pêches et Océans.

«Nous avons confiance que ça pourra fonctionner adéquatement parce que jusqu’à présent tous les tests l’ont démontré», avance Paul Robichaud, conseiller aux pêches pour l’APPCA.

«On espère convaincre le MPO d’accroître le nombre de pêcheurs et de casiers dans les zones fermées. L’objectif est de permettre une meilleure coexistence, entre la protection de la baleine noire et la pérennité de l’industrie du crabe des neiges qui est très importante pour l’économie de la Péninsule acadienne.»

La firme d’ingénierie Corbo, basée à Caraquet, a oeuvré à adapter les technologies existantes à la pêche commerciale de la région. C’est le système de déclenchement acoustique développé par la société EdgeTech qui a été retenu. Son application de marquage permet au pêcheur de connaître la profondeur, l’inclinaison, et la température du fond marin.

«Nous avons regardé ce qui se faisait à l’échelle de la planète. Il fallait une technologie adaptée à notre réalité: une mer profonde, une eau très froide et de longues distances à parcourir», précise Paul Robichaud.

Dans un article publié plus tôt cette année, Rob Morris, ingénieur chez EdgeTech, explique que l’entreprise collabore avec des pêcheurs, les autorités canadiennes et américaines et de nombreux organismes de conservation sur «des programmes de test au large des côtes du Massachusetts, du Rhode Island, du Maine, de la Californie et du Canada pour démontrer la fonctionnalité du système dans les conditions de pêche réelles».

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Du côté de l’Union des pêcheurs des Maritimes (UPM) et de la flottille côtière, des essais ont également été effectués au printemps dernier avec le système EdgeTech.

«Ça fonctionne très bien, on n’a vraiment pas eu de problèmes», se félicite Pierre Dupuis, directeur général d’Homarus, un organisme de recherche créé par l’UPM.

«C’est très encourageant, je ne sais pas si c’est parfait, mais ça répond aux besoins qu’on a tout de suite.»

L’organisation a depuis profité du Fonds d’adoption des équipements pour la protection des baleines pour passer une commande de quarante casiers sans cordages et équiper vingt bateaux de ce nouveau système. Chacun de ces casiers à crabe de nouvelle génération coûte près de 5000$.

«Pour l’instant, ça prend un permis spécial pour les utiliser et on ne peut s’en servir que dans les zones fermées», mentionne Pierre Dupuis, ajoutant que le ministère travaille à changer son règlement.

Il ne s’attend pas à voir les pêcheurs adopter massivement cette technologie dans un futur proche, notamment en raison du prix.

«Les plus avant-gardistes les adopteront et les autres viendront ensuite. Ça prendra du temps, on devra parler aux pêcheurs et leur montrer comment ça fonctionne.»

Dr Michael Moore, vétérinaire et scientifique de la Woods Hole Oceanographic Institution, s’est impliqué dans le développement des prototypes. Un des principaux défis, selon lui, sera de s’assurer de la compatibilité des différents modèles en développement, pour que les pêcheurs sachent où se trouvent tous les casiers et évitent de déposer leur matériel au même endroit.

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«Plus ces systèmes disposeront d’un moyen standard d’informer les autres navires de l’endroit où un engin est déployé, mieux ce sera», souligne-t-il.

«Je pense que la technologie a progressé, au point où il est devenu pratique de l’utiliser. Et je pense que l’industrie du crabe des neiges est suffisamment capitalisée pour passer à une utilisation commerciale. Le prix des unités de récupération est un obstacle important. Espérons qu’avec un volume plus important et l’harmonisation de la technologie, le matériel deviendra plus abordable.»

Questionné sur les progrès accomplis, le ministère des Pêches et des Océans et se dit satisfait du «niveau élevé d’intérêt» pour le Fonds d’adoption des équipements pour la protection des baleines.

«L’information sur les projets financés sera disponible sur le site Web du MPO une fois que toutes les ententes de financement auront été mises au point.»

 

Par Simon Delattre