Ce changement majeur pourrait avoir des effets importants sur l’industrie du homard au Canada.
Une autre tuile s’abat sur l’industrie de la pêche au homard. Un changement majeur aux États-Unis pourrait avoir d’importantes conséquences sur le homard canadien.
Face à la diminution des débarquements dans le golfe du Maine, on vient de hausser la taille minimale des homards qu’il est permis de pêcher en Nouvelle-Angleterre.
L’objectif est de préserver la ressource. Traditionnellement, cette mesure est révisée pour laisser à l’eau plus de homards qui vont se reproduire.
Des conséquences pour l’économie canadienne
Au Canada, on se prépare au choc de la décision américaine. Une quantité importante de homard américain est transformée dans les usines des provinces maritimes; cela permet de faire le pont entre nos saisons de pêche.
Les deux pêcheries, les efforts de pêche, sont largement complémentaires
, a souligné Nat Richard, le directeur général de l’Association des transformateurs de homard, en marge du salon U.S.-Canada Lobster Town Meeting, jeudi à Moncton, au Nouveau-Brunswick.

Nat Richard, le directeur général de l’Association des transformateurs de homard, à Moncton, jeudi. PHOTO : RADIO-CANADA / NICOLAS STEINBACH
C’est inévitable, une hausse de la taille permise signifie moins de homards pêchés. Dans ce cas-ci, cela voudra dire moins de homard américain transformé dans les usines canadiennes.
C’est difficile de prédire quelles seront les implications précises
, mais il y en aura, selon Nat Richard. Le Canada est le plus gros marché pour le homard américain
, rappelle-t-il.
Que les homards pêchés en Nouvelle-Angleterre soient plus gros est une chose, mais si les régulateurs américains décidaient d’interdire l’achat des homards canadiens qui sont sous la taille réglementaire aux États-Unis, cela pourrait faire mal aux pêcheurs canadiens.

Luc LeBlanc, conseiller aux pêches à l’Union des pêcheurs des Maritimes, à Moncton, jeudi. PHOTO : RADIO-CANADA / NICOLAS STEINBACH
Luc LeBlanc, conseiller aux pêches à l’Union des pêcheurs des Maritimes (UPM), a affirmé jeudi que c’est une possibilité, pas pour cette année, mais dans un futur rapproché.
On risquerait alors une baisse de 30 % à 40 % des exportations de homards vivants canadiens vers les États-Unis, avance-t-il.
Au Canada, la taille minimale de la carapace du homard qu’il est permis de pêcher est de 81 millimètres dans la plupart des zones. Pour certaines, c’est même plus bas.
Les pêcheurs du Nord-Est américain peuvent pêcher des homards de 82,5 millimètres et plus. Sur cinq ans à partir du 1er janvier 2025, la taille permise augmentera jusqu’à 86 millimètres.
C’est quand même une augmentation qui est considérable. Il n’y a pas beaucoup de homards canadiens qui se qualifieraient pour l’exportation aux États-Unis
, note Luc LeBlanc.

Des cargaisons de homard vivant des Maritimes partent de l’aéroport de Moncton pour être livrées en Chine. (Photo d’archives). PHOTO : RADIO-CANADA
Pour les pêcheurs canadiens, il y a l’important marché chinois et ceux qui se développent en Europe, mais le principal marché d’exportation reste les États-Unis.
Sauver les meubles
Dans un entretien en marge du salon U.S.-Canada Lobster Town Meeting, Luc LeBlanc a expliqué que la décision américaine a du bon sens, d’un point de vue de conservation de la ressource.

La rencontre U.S.-Canada Lobster Town Meeting a commencé jeudi à l’hôtel Crowne Plaza de Moncton. PHOTO : RADIO-CANADA / NICOLAS STEINBACH
Les stocks sont vraiment en péril
dans le golfe du Maine, selon le représentant de l’UPM.
La commission des pêches des États américains de l’Atlantique a estimé que la quantité de homards juvéniles a baissé de 39 % depuis 2016 dans le golfe du Maine et le banc de Georges. Les débarquements par les pêcheurs américains ont diminué d’environ 30 % l’an passé.
L’effet composé sur cinq ou six ans, c’est vraiment le désastre. Les pêcheurs et l’industrie en général au Maine sont en mode sauver les meubles.
Augmenter la taille minimale de la carapace pour le homard pour essayer d’augmenter ce qu’on appelle dans la pêche le recrutement, donc la production de larves et de nouveau homards
, dit-il. Plus on augmente la taille minimale, plus les femelles homards ont de chances de se reproduire.

Premier jour de pêche au homard de la saison 2022 au port de Meteghan, en Nouvelle-Écosse. PHOTO : RADIO-CANADA / ADRIEN BLANC
C’est appuyé par la science
, mentionne Nat Richard. Le Canada l’a fait aussi. Du côté canadien, on reconnaît que ça a rapporté, que c’étaient les bonnes décisions du point de vue de la gestion des stocks.
Le pari, c’est qu’à la longue, l’année d’après, dans deux ans, trois ans, éventuellement, ça rapporte
, conclut-il.
Dans l’immédiat – et au moment où une nouvelle fermeture temporaire d’usine est annoncée, celle de Raymond O’Neill & Son Fisheries, à Escuminac au Nouveau-Brunswick – le secteur de la transformation est fragilisé
, dit Nat Richard.
LA UNE : Un pêcheur mesure un homard pêché au large de Cape Elizabeth, dans le Maine, le 21 août 2013. PHOTO : REUTERS / BRIAN SNYDER
D’après le reportage de Nicolas Steinbach