MSX à l’Î.-P.-É. : des ostréiculteurs dans l’incertitude quant à l’avenir de leur métier

Publicité

Articles similaires

La Baie-des-Chaleurs accueillera le Congrès mondial acadien en 2029

C’est finalement la région de la Baie-des-Chaleurs qui accueillera...

Espoirs d’une excellente saison touristique aux Îles de la Madeleine

Des réservations en hausse par rapport à l’année dernière...

La région au Salon mondial des fruits de mer de Barcelone

Des représentants de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine font...

Homards grillés sur le BBQ

INGRÉDIENTS 1/3 tasse de beurre mou Les feuilles de...

Deux semaines après la découverte de la maladie MSX dans des huîtres de l’Île-du-Prince-Édouard, les cultivateurs son nerveux. En attendant les résultats des tests effectués par l’Agence canadienne d’inspection des aliments, ils s’organisent pour éviter une disparition de cette industrie.

Mona Jeffery ne s’en lasse pas. Comme presque chaque matin de l’été, elle prend la mer pour se rendre auprès des huîtres qu’elle cultive avec son mari, Gordon Jeffery, à Poplar Grove, dans l’ouest de l’Île-du-Prince-Édouard.

C’est comme notre petit paradis, assure-t-elle. Il n’y a rien comme travailler sur l’eau. C’est tranquille, on est dans la nature.

Ce petit coin de paradis est aujourd’hui touché par la sphère X multinucléée. Cette maladie, connue sous le sigle MSX, est causée par un parasite qui se développe dans les huîtres. Elle est capable de décimer toute une population en l’espace de quelques années.

Cela peut causer une perte de croissance, surtout pour les [huîtres] plus jeunes. Ensuite, après un an ou deux, le taux de mortalité peut atteindre les 90 à 95 % de la population.

Une citation de Cyr Couturier, professeur à l’Institut maritime de l’Université Memorial
Les huîtres sont triées et nettoyées sur des bateaux avant d'être remises dans des casiers.

Le chiffre d’affaires de l’entreprise de Gordon Jeffery, Five Star Shellfish, avoisine les quatre millions de dollars par année. Depuis l’arrivée de la MSX, il estime avoir perdu plus de cent mille dollars. PHOTO : RADIO-CANADA / JULIEN LECACHEUR

La MSX a été découverte à la mi-juillet dans la baie de Bedeque, au sud de la province. Depuis, l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) a confirmé sa présence dans trois autres zones, celles de Boughton, de New London et de Lennox Island Black Banks, celle où pêchent Mona Jeffery et son mari.

Cela nous a causé beaucoup de stress pendant les deux dernières semaines parce que nous ne savons pas ce qu’il va se passer et à quoi va ressembler notre avenir.

Une citation de Mona Jeffery, pêcheuse d’huîtres
Mona Jeffery est debout sur un bateau.

Mona Jeffery élève et pêche des huîtres depuis huit ans dans la région de Poplar Grove, dans l’ouest de l’Île-du-Prince-Édouard. PHOTO : RADIO-CANADA / JULIEN LECACHEUR

Impact économique

En plus de l’impact émotionnel, les effets sont aussi d’ordre économique. Gordon Jeffery est propriétaire de Five Star Shellfish depuis 2001. Il élève et vend près de 15 millions d’huîtres annuellement. Son entreprise génère chaque année des revenus de trois à quatre millions de dollars. Toutefois, la présence de la MSX commence déjà à se faire sentir.

Cela m’a déjà coûté au moins cent mille dollars, peut-être même cent vingt mille dollars, je ne sais pas. Mais nous avons déjà perdu des ventes, ce qui va toucher notre entreprise. Comment allons-nous payer nos employés et les pêcheurs? se demande-t-il.

Gordon Jeffery pilote son bateau au large du port de pêche de Milligan.

Gordon Jeffery pêche et élève des huîtres depuis 2001. Il a peur de voir son industrie disparaître. PHOTO : RADIO-CANADA / JULIEN LECACHEUR

Cette inquiétude permanente augmente face à l’inconnu. Depuis deux semaines, l’ACIA multiplie les tests, mais les résultats se font encore attendre.

C’est quelque chose qu’on n’a jamais vécu auparavant. Il y a beaucoup d’inconnu, beaucoup de questions et pas beaucoup de réponses, explique Mona Jeffery.

Le plan de la province se fait attendre

Des réponses se font aussi attendre du côté du gouvernement provincial. En effet, si le ministre Cory Deagle assure qu’il multiplie les rencontres avec les agences fédérales et l’industrie, il n’a toujours pas soumis de plan à court ou long terme pour faire face à la MSX.

Nous apporterons une aide financière au moment opportun, mais pour le moment, on ne connaît pas l’ampleur du problème ni les impacts sur l’industrie.

Une citation de Cory Deagle, ministre des Pêches, du Tourisme et des Sports de l’Î.-P.-É.
Cory Deagle prend la parole en Chambre.

Le ministre des Pêches, du Tourisme, du Sport et de la Culture, Cory Deagle, assure qu’un plan à court et à long terme pour les pêcheurs d’huîtres sera bientôt présenté. PHOTO : ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE DE L’ÎLE-DU-PRINCE-ÉDOUARD

Le ministre Deagle dit néanmoins être très préoccupé.

C’est le tout début. Nous nous concentrons maintenant sur la collaboration avec l’Agence canadienne d’inspection des aliments pendant qu’elle fait des tests dans d’autres zones pour voir si cela se propage [et] pour l’en empêcher, affirme Cory Deagle.

L’industrie ostréicole de la région du lac Bras d’Or, en Nouvelle-Écosse, ne s’est jamais complètement rétablie depuis que la maladie MSX y est présente, soit depuis 2022. Cette maladie avait aussi atteint la baie de Chesapeake, aux États-Unis, en 1959, ce qui avait forcé plusieurs ostréiculteurs à se recycler dans la palourde.

Nos prochaines étapes consisteront à déterminer comment nous pouvons avancer, et je suppose qu’on pourrait dire qu’il s’agit de vivre avec la maladie MSX, car elle ne va pas s’en aller, malheureusement.

Une citation de Cory Deagle, ministre des Pêches de l’Île-du-Prince-Édouard

Plusieurs ostréiculteurs espèrent une financière gouvernementale, confirme le ministre, ajoutant que la province fera tout en son pouvoir pour les aider.

En attendant, Mona Jeffery et son mari n’ont d’autre choix que de s’adapter. Pour eux, pas question de laisser les huîtres au fond de l’eau plus longtemps.

Les huîtres vont survivre si on les sort de l’eau tout de suite et si on les envoie au marché. Si elles restent dans l’eau, là, il y aura une véritable possibilité de les voir mourir d’ici deux ou trois ans, assure-t-elle.

Trois employés travaillent sur un bateau.

L’entreprise Five Star Shellfish embauche une vingtaine d’employés. La MSX fait craindre le pire. PHOTO : RADIO-CANADA / JULIEN LECACHEUR

En effet, la disparition de l’industrie est dans toutes les têtes.

Que voulez-vous que je fasse? J’ai pêché des huîtres pendant vingt-trois ans, je ne peux pas abandonner.

Une citation de Gordon Jeffery, propriétaire, Five Star Shellfish

Pour s’en sortir, les pêcheurs d’huîtres réclament l’aide des consommateurs. Continuez à manger des huîtres, elles sont bonnes pour la santé humaine, cela n’a pas changé, assure Mona Jeffery.

En effet, pour Gordon Jeffery, c’est une question de survie. Cela va aider nos entreprises, nos communautés et l’Île-du-Prince-Édouard. Alors, continuez de manger des huîtres.

LA UNE : L’entreprise Five Star Shellfish, à Poplar Grove, élève et vend près de 15 millions d’huîtres chaque année.

PAR Julien Lecacheur avec des informations de Victoria Walton, de CBC