Après un an et demi de démarches, la Coopérative des pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine met finalement la main sur un permis d’acquéreur de produits marins. Elle pourra ainsi acheter seulement du homard et le mettre en marché vivant, sans transformation.
Le groupe de pêcheurs madelinots, qui s’est formé à la suite de la faillite de LA Renaissance, pourra ainsi devenir le septième acheteur de homard de l’archipel. La Coopérative compte actuellement une trentaine de membres.
Le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) avait d’abord refusé d’octroyer ce permis, une décision contestée par la Coopérative devant le Tribunal administratif du Québec.
Ce n’est toutefois pas le recours devant le tribunal qui a provoqué la volte-face ministérielle, mais plutôt le dépôt en juin dernier du rapport de consultations sur l’octroi de permis d’acquéreur de produits marins.
[…] Les conclusions ouvrent la porte à la délivrance de permis d’acquéreur lors de contextes précis et sous certaines conditions
, peut-on lire dans un communiqué du MAPAQ.
Ni la Coopérative des pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine ni l’Association québécoise de l’industrie de la pêche n’étaient disposées à réagir à la nouvelle vendredi après-midi.
Des visions opposées
Entre le 4 et le 22 mars, la firme TACT a consulté, à la demande du MAPAQ, 40 organisations afin de recueillir les perspectives du milieu maritime dans le but de favoriser une prise de décision éclairée dans le traitement des nouvelles demandes de permis d’acquéreur
.
Le rapport final découlant de ces consultations met en lumière les visions opposées des pêcheurs, particulièrement ceux des îles de la Madeleine, et des transformateurs sur la question.

En 2024, les pêcheurs madelinots ont battu un record de débarquements avec plus de 16 millions de livres de homards débarquées. (Photo d’archives) Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose
Les pêcheurs consultés dans la province croient généralement que l’arrivée de nouveaux joueurs pourrait stimuler la compétition et favoriser une meilleure répartition de la richesse. Toutefois, certains craignent tout de même que l’effet positif soit de courte durée et que les prix finissent par baisser à long terme.
De manière générale, les pêcheurs croient que le permis d’acquéreur devrait leur être accessible, pour accroître leur contrôle sur la ressource et leur rentabilité.
Le rapport précise que l’ensemble des pêcheurs madelinots consultés sont favorables à l’octroi de nouveaux permis, alors que ceux consultés ailleurs au Québec sont plutôt neutres ou s’y opposent.
Le document rapporte que les pêcheurs de l’archipel estiment que le nombre d’acheteurs de homard est insuffisant pour qu’il y ait une saine concurrence.
La question est visiblement plus saillante [aux îles de la Madeleine]
, peut-on lire dans le rapport. Le document souligne le fait que le refus initial d’octroi de permis à la Coopérative des pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine a été médiatisé, ce qui a suscité la réflexion des parties prenantes.
De leur côté, les transformateurs et les acquéreurs de produits marins consultés sont tous défavorables à l’arrivée de nouveaux joueurs dans leur marché.

Les transformateurs de produits marins sont défavorables à l’octroi de nouveaux permis d’acquéreurs. (Photo d’archives) Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose
[Les transformateurs] estiment que leurs écosystèmes sont saturés.
Certains transformateurs croient même que l’ajout d’acquéreurs pourrait entraîner des pertes d’emploi, voire des faillites. Les ressources marines seraient partagées entre un plus grand nombre de joueurs, ce qui bousculerait l’équilibre actuel du marché, selon eux.
L’imprévisibilité de la disponibilité des ressources et l’aspect cyclique de la pêche ont également été soulevés par les détenteurs de permis de transformation, qui appellent à une certaine prudence.
Bien que les débarquements de homards fracassent des records dans les dernières années, les stocks d’autres espèces, comme la crevette nordique, connaissent plutôt des déclins importants.
Par ailleurs, des organisations socioéconomiques ayant pris part aux consultations ont également soulevé des préoccupations sur l’exportation possible des ressources marines hors des marchés locaux par des acquéreurs.
LA UNE : La Coopérative des pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine avait déposé une demande de permis en avril 2023. (Photo d’archives) Photo : CBC / Brian McInnis