Le Parc de Gros-Cap songe à déménager

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Les gestionnaires du parc de Gros-Cap réfléchissent déjà à déplacer les bâtiments avant que la mer les en empêche. L’érosion menace de couper l’accès à la presqu’île où des milliers de touristes campent chaque été.

Mon plus gros stress au parc, c’est l’érosion, lance d’emblée le directeur de la Corporation du parc de Gros-Cap, Sébastien Cummings.

Chaque jour, son équipe doit s’assurer que les 150 sites de camping et les bâtiments demeurent sécuritaires, malgré la perte constante de terrain.

Chaque fois qu’il y a une tempête, on doit reculer les clôtures du bord de la falaise pour être sûr que ce soit sécuritaire, on doit le faire deux ou trois fois par année, explique M. Cummings. Ce dernier souligne qu’il n’est pas rare qu’une seule tempête avale près de quatre mètres de terrain.

Une clôture de bois est placée entre une côte érodée et des sites de camping.

Le recul des falaises s’accélère, ce qui soulève des enjeux de sécurité. Des équipes du ministère de la Sécurité publique inspectent le site chaque année. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE

Quatre sites de camping qui étaient accessibles en 2024 ne le seront plus l’an prochain, car ils sont désormais jugés trop dangereux. Au-delà de la côte, l’érosion gruge aussi les revenus de l’organisme à but non lucratif.

Chaque année, il y a des sites de camping de moins à cause de l’érosion.

Une citation de Sébastien Cummings, directeur de la Corporation du parc de Gros-Cap
Le parc de Gros-Cap.

La partie arrière du bâtiment jaune à l’avant-plan a été déconstruite, car l’érosion de la falaise se rendait jusqu’aux fondations du bâtiment. (Photo d’archives) PHOTO : LUC MIOUSSE

En début d’année, la partie arrière d’un bâtiment servant d’abri aux campeurs a dû être déconstruite, car elle menaçait de s’effondrer en bas de la falaise.

Un bâtiment situé près d'une côte érodée.

Ce bâtiment était auparavant presque deux fois plus long; sa partie arrière a été retirée. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE

Des travaux d’enrochement ont aussi été nécessaires pour protéger les installations septiques menacées par l’assaut des vagues.

Et ce n’est que la pointe de l’iceberg, car l’érosion menace de couper l’accès au parc construit sur une presqu’île. L’étroit cordon où se trouve la route d’accès s’amincit sans cesse.

Photo aérienne du parc de Gros-Cap, un site qui s'avance dans la mer et qui est érodé.

L’accès au parc de Gros-Cap ne sera problablement pas éternel. L’érosion s’accélère dans l’anse qui borde le chemin d’accès. PHOTO : MARIO LAFRANCE

En 2021, le ministère du Tourisme avait octroyé 477 000 $ à la Corporation du parc de Gros-Cap pour maintenir l’accès au site, sécuriser les bâtiments et les installations septiques. Sans des travaux d’urgence, l’accès au site pourrait disparaître d’ici 2025 , pouvait-on lire dans le communiqué.

Trois ans plus tard, la somme a presque toute été dépensée dans des études préalables aux travaux et dans l’enrochement des installations septiques, mais rien n’a encore été fait pour protéger la route d’accès.

Les premiers plans qu’on avait faits pour protéger les trois secteurs les plus critiques du parc pour les 50 prochaines années évaluaient les coûts à 8 M$, mentionne Sébastien Cummings. C’est sûr que c’était impossible pour nous de payer ça.

Une côté enrochée avec deux bâtiments jaunes à l'arrière.

L’argent du ministère du Tourisme a principalement permis d’enrocher les installations septiques et de faire des études. L’argent restant n’est pas suffisant pour un réaliser un autre ouvrage de protection. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE

La solution à long terme : déménager

Face à une érosion qui s’accélère et des coûts d’enrochement qui explosent, la Corporation du parc de Gros-Cap fait le constat qu’il ne pourra pas gagner le combat contre la mer.

Enrocher, ça coûte cher, ce sont des études, des ingénieurs, c’est vraiment beaucoup de sous, affirme le directeur Sébastien Cummings. À long terme, on ne peut pas mettre tous nos profits sur de la roche. Il va falloir trouver d’autres sources de financement, d’autres solutions pour l’avenir.

Il faut un plan de sortie. À long terme, il va falloir penser au déménagement.

Une citation de Sébastien Cummings, directeur de la Corporation du parc de Gros-Cap

Déjà, la Corporation du parc de Gros-Cap tente d’acheter un terrain adjacent à son site. Les négociations entamées il y a plusieurs mois n’ont pas encore permis d’arriver à une entente.

C’est sûr que ça serait un terrain idéal dans le futur pour commencer à déplacer des bâtiments, mais on regarde aussi à d’autres endroits aux îles de la Madeleine, précise M. Cummings.

Entre-temps, la Corporation souhaite tout de même trouver du financement pour procéder à des travaux d’enrochement pour sécuriser l’accès au parc pour au moins quelques années.

On regarde plus dans une optique d’une dizaine d’années pour nous donner le temps de se déplacer sans fermeture et sans pertes d’emplois, avant d’arriver à un plan B, indique le directeur.

Une route situé près d'une côte érodée.

La direction craint que l’érosion gagne la route et fasse perdre l’accès au reste du territoire du parc. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE

L’aide de Québec demandée

Pour soutenir la Corporation du parc de Gros-Cap dans ses démarches, la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine entend déposer une demande au Bureau de projets en érosion et submersion côtières du ministère des Affaires municipales et de l’Habitation.

La Municipalité demande le soutien de Québec pour deux volets : sécuriser l’accès au parc à court terme et élaborer un plan d’adaptation à long terme pour pérenniser les activités.

On souhaite avoir un ouvrage de protection qui serait peut-être un peu plus transitoire, qui permettrait de sécuriser l’accès pour un nombre X d’années pour permettre au parc Gros-Cap d’amorcer sa réflexion et de faire son plan d’adaptation pour voir de quelle façon ça va l’impacter à plus long terme, explique la cheffe de section en action climatique à la Municipalité des Îles, Jasmine Solomon.

Jasmine Solomon photographiée près d'une côte érodée du parc de Gros-Cap.

La cheffe de section en action climatique à la Communauté maritime des Îles, Jasmine Solomon. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE

Parmi 31 sites analysés dans le cadre d’intervention en érosion et en submersion côtières de la Communauté maritime des Îles, le parc de Gros-Cap se classe au 14e rang des sites les plus vulnérables de l’archipel.

En 2016, Ouranos avait effectué une analyse coûts-avantages du site qui avait démontré que l’absence d’une intervention au parc de Gros-Cap aurait des impacts majeurs.

L’étude concluait que les coûts de la non-intervention étaient supérieurs au fait d’intervenir, donc on ne pouvait pas se permettre en tant que communauté de laisser aller le camping ou de ne rien faire, parce que ça nous coûterait plus cher collectivement, précise Jasmine Solomon.

Des falaises de grès rouge érodées.

Les falaises de grès rouge du parc de Gros-Cap sont rongées par la mer. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE

Mme Solomon précise qu’il n’existe pas encore de projections spécifiques aux îles de la Madeleine qui permettraient d’estimer à quel moment l’érosion pourrait couper l’accès à la presqu’île du parc de Gros-Cap.

On ne sait pas si la prochaine tempête ne va pas venir éventuellement aggraver la situation, indique-t-elle. L’accès à l’ensemble du site est vulnérable, avec les systèmes d’eau potable et d’eaux usées.

Un trou entouré de clôtures.

Deux trous de suffosion se sont créés sur le territoire du parc. Il s’agit d’un phénomène d’érosion créé par les vagues qui s’infiltrent dans les grottes au pied des falaises. La vague dirigée vers le haut de la grotte provoque l’érosion graduelle du plafond qui finit par s’effondrer. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE

De son côté, le directeur de la Corporation du parc de Gros-Cap, Sébastien Cummings, sait que l’avenir ne sera pas de tout repos.

Ce sont des travaux monumentaux qui vont coûter très cher, c’est pour ça qu’on dépose des demandes, dit-il. Je pense que ça va être la plus grosse partie de mon travail dans les prochaines années.

Le directeur garde tout de même espoir de pérenniser les activités du site récrétouristique. Je pense qu’on va réussir à trouver des solutions, dit-il.

 

LA UNE : Le parc de Gros-Cap est située sur une presqu’île très vulnérable à l’érosion. Le parc abrite 150 sites de camping, deux auberges de 50 lits, quatre chalets et plusieurs bâtiments de services. PHOTO : MARIO LAFRANCE

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