Le ministère des Pêches et Océans (MPO) annonçait, en octobre dernier, que des permis récréatifs de chasse au phoque seraient maintenant disponibles pour les pêcheurs des provinces de l’Île-du-Prince-Édouard et du Nouveau-Brunswick. Dans l’est du Canada, ces permis étaient auparavant seulement octroyés au Québec et à Terre-Neuve-et-Labrador.

Selon la Politique d’émission des permis pour la chasse du phoque dans l’est du Canada du MPO, un permis de chasse du phoque à usage personnel autorise le titulaire à abattre jusqu’à six phoques du Groenland ou phoques gris. Avant de pouvoir obtenir un tel permis, il est obligatoire de suivre une session d’information sur la chasse pratiquée sans cruauté.
L’Association des chasseurs de phoque intra-Québec (ACPIQ), dont le siège social est aux Îles-de-la-Madeleine, se réjouit de cette annonce. Son directeur, Gil Thériault, mentionne que l’ACPIQ travaille de près avec les différentes associations de pêcheurs pour les assister dans le développement de la chasse aux phoques. À titre d’exemple, il explique que l’ÎPÉ et le NB n’ont pas de formateurs accrédités pour donner la formation obligatoire. «Au Québec, nous avons développé une politique pour accréditer des formateurs afin de nous assurer que les exigences du MPO soient remplies et que le processus soit uniforme.» Dans cette formation, on y explique l’abattage sans cruauté qui se fait en trois étapes, les armes permises, les espèces de phoques qu’on a le droit de chasser et la façon de découper l’animal.
Formation des pêcheurs de l’Île
Gil Thériault affirme qu’il y a un intérêt pour la chasse au phoque de la part des pêcheurs de l’ÎPÉ et du NB. Il a récemment offert une session d’information en ligne à environ 25 pêcheurs de l’Île-du-Prince-Édouard, en collaboration avec le PEI Fishermen’s Association. Deux autres sessions sont prévues pour le NB en janvier 2025. Après avoir suivi cette formation, les participants reçoivent leur certificat d’attestation nécessaire pour faire une demande d’obtention d’un permis de chasse récréative. «Les détails de l’annonce ne sont pas encore connus, comme les zones et périodes de chasse ou le nombre de permis qui seront accordés, mais c’est certain qu’il y a un intérêt dans la communauté», d’ajouter M. Thériault.

Le directeur de l’ACPIQ se dit enthousiaste que les permis s’étendent à l’ÎPÉ et au NB. «On militait pour que les permis à usage personnel soient accordés, tout comme l’Union des pêcheurs des Maritimes (UPM) le faisait, parce que le phoque gris nous préoccupe. Il a beaucoup d’influence sur les pêches au niveau de la prédation des poissons», dit-il.
Il ajoute que la chasse aux phoques n’en est qu’à ses débuts dans la région. «Il y a un marché, mais pas assez de produits qui sont chassés. Par exemple, une des compagnies de fourrure du Québec prend toutes ses fourrures à Terre-Neuve, parce qu’il n’y a pas assez de phoques chassés au Québec. Il faut commencer par développer, dans les communautés, une expertise pour cette chasse. Pour qu’un jour la chasse commerciale puisse exister, il faut développer en parallèle une infrastructure pour soutenir le marché. Les chasseurs doivent savoir que c’est une activité qui sera rentable.»
Vision écologique et économique
M. Thériault propose une vision écologique et économique pour le développement de la chasse au phoque. «On vit dans une époque où on veut utiliser tout le produit pour être écologique et viable économiquement. Aux Îles-de-la-Madeleine, on a l’expertise et on développe tranquillement notre infrastructure. On veut créer une recette pour montrer comment travailler avec le phoque pour que ce soit payant, en ayant le moins de rejet possible, et ensuite diffuser cette recette dans les maritimes et sur la côte nord. Le contrôle de la prédation du phoque est, à mon avis, une question de survie de toutes les communautés côtières du golfe du Saint-Laurent.»
Il ajoute, en concluant, que beaucoup de facteurs sont en cause dans la réduction des stocks de poisson, comme le réchauffement de l’océan ou l’oxygénation de l’eau, mais la prédation du poisson par les phoques est aussi un problème.
Selon les dernières données disponibles du MPO, on estime à 4,7 millions la population du phoque du Groenland (2019) et à 366 400 celle du phoque gris (2021).
«Nous finalisons le développement des chasses pilotes avec les membres de l’Union des pêcheurs des Maritimes et de la PEI Fishermen’s Association», d’écrire le MPO. «Ces chasses pilotes commenceront dans les jours suivant la délivrance des permis et se poursuivront jusqu’à la mi-décembre, date à laquelle la saison prendra fin pour permettre la période de mise bas des phoques gris. À l’heure actuelle, une quarantaine de participants sont prévus dans les zones désignées de l’est du Nouveau-Brunswick et de l’est à l’ouest de l’Île-du-Prince-Édouard.»
PAR Lise Frigault
LA UNE : Population abondante de phoques au Canada. (Photo : Canadian Seal Products)