Le torchon brûle entre les homardiers madelinots et les industriels

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Les relations entre l’Association québécoise de l’industrie de la pêche (AQIP) et l’Office des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine (OPHIM) s’annoncent tendues en 2025. L’AQIP a conclu 2024 en demandant l’abolition du Plan conjoint des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine qui régit la mise en marché du homard de l’archipel depuis 1991.

Dans une demande adressée à la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec en novembre, l’AQIP soutient que les acheteurs de homard de l’archipel ont des obligations que ceux du reste du Québec, des Maritimes et de Terre-Neuve n’ont pas, alors qu’ils sont en compétition sur les mêmes marchés.

Parmi ces obligations, on compte le paiement d’un cautionnement que l’AQIP juge beaucoup trop élevé pour garantir le paiement du homard aux pêcheurs en cas de problèmes financiers d’un industriel. Cette garantie bancaire a été revue dans une décision de la Régie en juillet, comme demandé par l’OPHIM à la suite de la faillite de LA Renaissance. Les homardiers madelinots ont collectivement perdu 2,45 millions de dollars dans cette affaire.

L’AQIP fait également valoir que les acheteurs madelinots, en raison du contexte d’insularité, doivent acquitter des coûts de transport maritime, en plus du transport terrestre. Selon les industriels, les pêcheurs reçoivent un pourcentage élevé de ces coûts de transport dans leur paie, bien que cette dépense ne soit pas à leur charge.

Le coût du plan conjoint pour les industriels est devenu excessif. Ils n’auront bientôt plus de marge bénéficiaire. Il faut que ce soit rentable pour les deux parties, un plan conjoint.

Une citation de Jean-Paul Gagné, directeur général de l’Association québécoise de l’industrie des pêches

L’AQIP fait aussi valoir qu’en plus de ces obligations particulières aux acheteurs madelinots, un 7e permis d’acquéreur a été octroyé à la Coopérative des pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine « provoquant ainsi un nouveau partage de la ressource ».

Les coûts engendrés par le plan conjoint, notamment ceux liés à l’embauche d’experts ou d’avocats lors de conciliations ou d’arbitrages, sont aussi dénoncés par les industriels.

Qu’est-ce qu’un plan conjoint?

Le plan conjoint est essentiellement un outil à la disposition des producteurs agricoles et des pêcheurs; il leur donne la possibilité de négocier collectivement toutes les conditions de mise en marché de leur produit ou de leur pêche et d’en réglementer des modalités, selon la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec.

En vigueur depuis 1991, le Plan conjoint des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine vise tout homard pêché dans la zone 22 par les 325 homardiers de l’archipel. Chaque année, l’OPHIM et l’AQIP signent une convention de mise en marché découlant du plan conjoint.

De son côté, l’Office des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine rejette la demande de l’AQIP.

C’est quelque chose qui n’a aucun bon sens. Ça a été mis là pour les pêcheurs et ça va rester là pour les pêcheurs.

Une citation de Rolland Turbide, président de l’Office des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine

M. Turbide rappelle que le plan conjoint se veut un outil de travail permettant aux homardiers madelinots d’avoir un prix équitable.

Sinon, [les acheteurs] vont mettre le prix qu’ils vont vouloir et personne ne pourra défendre ça, croit le président de l’Office. En 1990, on a eu 1,72 $/livre, ça n’avait pas de bons sens. C’est pour ça que le Plan conjoint a été mis en place.

C’est la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec qui aura le dernier mot et qui tranchera sur la demande de suspension ou d’abolition du plan conjoint et la convention de mise en marché.

Dénonciations de la convention avant Noël

Par ailleurs, l’année 2024 s’est terminée par des dénonciations parallèles de la convention de mise en marché du homard devant la Régie, autant du côté de l’AQIP que de l’OPHIM.

On n’a pas de décision de la Régie sur notre requête d’abolition ou de suspension, ils ne décideront pas une telle chose sans entendre les parties. Entre-temps, on a dénoncé la convention, précise le directeur de l’Association québécoise de l’industrie des pêches, Jean-Paul Gagné.

Le 16 décembre, l’AQIP a informé la Régie et l’OPHIM de son intention de modifier plusieurs articles de la convention 2024, notamment ceux portant sur la méthode de fixation du prix de la livre payable aux pêcheurs et le paiement du cautionnement.

L’OPHIM a répliqué le 20 décembre en identifiant d’autres articles sur lesquels elle souhaitait négocier, en plus de ceux ciblés par l’AQIP.

Rolland Turbide photographié dans le bureau de l'Office.

Le président de l’Office des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine, Rolland Turbide, souhaite rencontrer les représentants de l’AQIP dès que possible. (Photo d’archives) Photo : Radio-Canada / Isabelle Larose

Rolland Turbide affirme que l’AQIP refuse de rencontrer l’OPHIM depuis le printemps 2024, et ce, malgré la décision de la Régie en juillet 2024 qui implique plusieurs changements potentiels à la prochaine convention de mise en marché.

Ils ne veulent pas nous rencontrer, c’est ça qui nous frustre le plus, s’indigne le président de l’OPHIM, Rolland Turbide, président de l’Office des pêcheurs. Depuis le mois de juillet qu’on demande une rencontre avec eux autres et ils n’ont pas voulu. Je trouve ça déplorable.

Nous déplorons qu’en raison du refus de l’AQIP de rencontrer l’OPHIM, nous soyons contraints de transmettre en fin d’année une liste d’articles à négocier, sans jamais avoir pu faire de retour ensemble sur la saison 2024 ou sur la décision de la Régie du 23 juillet 2024, ce qui nous a privés jusqu’ici des échanges pourtant essentiels à la résolution des questions et enjeux qui interpellent tant les acheteurs que les pêcheurs , peut-on lire dans la lettre de l’Office des pêcheurs adressée à l’AQIP le 20 décembre 2024.

Jean-Paul Gagné debout devant un lutrin durant le congrès de l'AQIP.

Le directeur général de l’AQIP, Jean-Paul Gagné, soutient que le plan conjoint et la convention de mise en marché ne sont plus profitables pour les industriels. (Photo d’archives) Photo : Radio-Canada

De son côté, le directeur général de l’AQIP se défend d’avoir refusé de négocier avec l’OPHIM en 2024.

Ce n’est pas vrai, c’est faux, lance fermement Jean-Paul Gagné. Pour négocier, il faut que la convention soit dénoncée. L’OPHIM vient de la dénoncer le 20 décembre et nous, on l’a fait le 16 décembre. Tant que ce n’est pas dénoncé, qu’est-ce qu’on négocie?

Jean-Paul Gagné précise tout de même que l’AQIP n’était pas prête à faire un bilan de la saison 2024 avant la fin de l’année, tel que l’Office l’aurait souhaité.

L’OPHIM a demandé à l’AQIP de lui communiquer un calendrier d’un minimum de cinq dates en janvier et février 2025 pour tenir des rencontres de négociation visant à établir les conditions de mise en marché pour la saison 2025.

LA UNE : La mise en marché du homard madelinot est régi par un plan conjoint, en vertu de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche. (Photo d’archives) Photo : CBC / Brian McInnis

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