Quelque 20% du Golfe du Saint-Laurent sont englacés. La situation est relativement meilleure que les années précédentes, marquées par des absences de glace record. Plusieurs autres signes encourageants viennent des eaux profondes moins chaudes et plus oxygénées que dans le passé.
«Ce ne sera pas une grosse année de glace, on sera vraisemblablement sous la normale, mais on a dépassé le seuil d’une année libre de glace», affirme le chercheur en océanographie physique pour Pêches et Océans Canada, Peter Galbraith.
D’après les derniers relevés océanographiques réalisés par le scientifique, quelque 10 km³ de glace de plus de 5 centimètres d’épaisseur recouvrent le Golfe du Saint-Laurent. Autrement dit, 20% du Golfe sont pris dans la banquise.
«Il y en a sur une bonne superficie, mais la glace reste très mince et très fragile. Elle fait en moyenne autour de 10 centimètres d’épaisseur», relève Peter Galbraith.
La situation est donc relativement meilleure que l’an dernier. 2024 avait fracassé les records avec le plus faible couvert de glace jamais observé depuis 1969.
Un froid «trop tardif»
Cette année, l’intégralité de l’estuaire est englacé, de même que la baie des Chaleurs et la péninsule de la Gaspésie jusqu’à l’île d’Anticosti. L’Île-du-Prince-Édouard est également entourée de banquise. En revanche, le reste du Golfe demeure à l’eau libre.
Autour de l’Î.-P.-É., la faible profondeur de l’eau explique la formation de glace beaucoup «plus rapide et plus facile», selon Peter Galbraith.
«En revanche, les températures de l’eau sont largement supérieures au point de congélation dans la plupart des zones, il reste beaucoup trop de chaleur pour que la glace se forme», explique l’océanographe.
Le point de congélation de l’eau salée est d’environ -1,9 °C comparativement à 0 °C pour l’eau douce.
Les récents froids n’auront donc pas suffi à emprisonner le Golfe dans sa traditionnelle couverture glacée. «Ça a été trop tardif, le froid n’est vraiment arrivé dans la région qu’en février», observe Peter Galbraith.
Autre signe encourageant, la température des eaux profondes a légèrement baissé. Un pic de température avait été observé en 2022, mais depuis 2023, les chercheurs notent un léger refroidissement.
Plus d’eau froide entrant dans le Golfe
«Ça va prendre du temps avant que ça n’atteigne tout le Golfe, mais on s’attend à ce que cette tendance se poursuive dans les années à venir», affirme Peter Galbraith.
L’eau qui rentre dans le Golfe via le détroit de Cabot est en effet plus froide qu’avant. Cette eau est un mélange de deux courants océaniques : le Gulf Stream très chaud et celui du Labrador plus froid.
Alors que le Gulf Stream dominait ce mélange au cours des dernières années, le courant du Labrador reprend désormais le dessus.
Peter Galbraith croit également que les concentrations en oxygène dissous dans les eaux profondes s’amélioreront dans le futur, «car les eaux du Labrador sont plus oxygénées.»
En attendant, à la surface, il faudrait que le froid actuel se maintienne pour avoir une chance de se rapprocher des conditions normales de glace, avec la moitié du Golfe recouvert.
Selon Peter Galbraith, les prévisions météorologiques ne semblent néanmoins pas aller dans ce sens : «Ce n’est pas bon, on annonce déjà des -4°C, -5°C dans deux semaines. Quand l’hiver commence à s’estomper, c’est trop tard, la glace peut même fondre.»
LA UNE: «Il reste beaucoup trop de chaleur pour que la glace se forme dans la plupart des zones [du Golfe du Saint-Laurent]», explique l’océanographe Peter Galbraith. (Photo : Gracieuseté)
PAR Marine Ernoult / IJL – Réseau.Presse – La Voix acadienne