Les buttes et les cantons des Îles-de-la-Madeleine racontent l’histoire d’une terre façonnée par le vent, la mer et les générations de Madelinots qui l’ont habitée. Qu’ils soient le décor de légendes, des repères pour les marins ou des lieux de vie pour la communauté, ils sont au cœur de l’identité insulaire.
Des hauteurs imposantes de la Big Hill aux contours légendaires de la Butte-du-Mort, en passant par les reliefs emblématiques des Demoiselles, les buttes des Îles-de-la-Madeleine ne se contentent pas de façonner le paysage. Elles nourrissent l’imaginaire collectif, témoignent d’un riche héritage culturel et servent de repères pour marins et habitants.
Les cantons, eux, ancrés dans la mémoire des Madelinots, sont bien plus que de simples divisions géographiques. Ils représentent le premier repère d’appartenance, une toile de fond indissociable du quotidien insulaire.
Les buttes : sentinelles du paysage et gardiennes d’histoires
Sur l’Île d’Entrée, la Big Hill domine l’archipel du haut de ses 174 mètres. Visible dès l’arrivée en bateau, elle offre un panorama à couper le souffle et un havre de paix aux troupeaux de vaches qui y paissent en liberté.
Non loin, sur l’Île Brion, la Butte-du-Mort alimente les légendes. Anselme Chiasson rapporte qu’un naufragé y monta la garde avec la cloche du navire, guettant une voile à l’horizon. Il ne redescendit jamais, son corps retrouvé au pied d’un arbre, renforçant le mystère qui entoure ce lieu.
À Havre-Aubert, les Demoiselles incarnent l’histoire maritime de l’archipel. Ancien point de refuge pour les navigateurs, elles se composent d’une butte plus élevée, la demoiselle, et d’une plus petite, la Butte de la Croix, où trône une croix bénie en 1811. Ce site offre une vue privilégiée sur l’Île d’Entrée et le site historique de La Grave.
Plus au nord, à L’Étang-du-Nord, la Butte du Vent s’impose comme l’un des sommets les plus élevés de l’archipel. Abritant des tours de communication, elle attire les randonneurs en quête d’un panorama unique sur Havre-aux-Basques, Fatima et Havre-aux-Maisons. On y trouve également une source où certains viennent encore cueillir l’eau de Pâques, perpétuant une vieille tradition.
À Havre-aux-Maisons, la Butte Ronde, surplombant le phare du Cap Alright, est auréolée de mystère. On raconte qu’un trésor y serait enfoui, à un endroit d’où l’on peut voir les sept îles de l’archipel. Près d’elle, les Buttes Pelées, rongées par l’exploitation d’une carrière, ont fait l’objet de nombreuses mobilisations citoyennes pour la préservation de leur richesse naturelle.
Enfin, à Grosse-Île, la Rock Forest et le Cap Dauphin sont des lieux prisés des amateurs de plein air, rappelant que les buttes des Îles sont aussi des terrains de jeux naturels pour les randonneurs, skieurs et amoureux de la nature.
Les cantons : des territoires d’appartenance encore bien vivants
Si les buttes sont les gardiennes des paysages madelinots, les cantons en sont l’âme vivante. Loin d’être de simples repères administratifs, ces territoires portent une identité propre, transmise de génération en génération.
Des noms comme Portage-du-Cap, Gros-Cap, Cap-Vert, Pointe-aux-Loups ou Dune-du-Sud évoquent non seulement des lieux, mais aussi des modes de vie, des souvenirs et un attachement profond à la terre et à la mer. Chaque canton possède sa butte, son étang, sa plage, des éléments naturels qui définissent son caractère unique.
Les cantons sont aussi marqués par l’histoire humaine. Les maisons y sont dispersées sur des îlots rocheux, préservant ainsi les espaces naturels. Les noms de famille y dessinent encore des «renclos», ces regroupements familiaux qui témoignent d’un passé où les liens de parenté dictaient l’organisation du territoire.
Ils sont aussi synonymes de rassemblements. L’étang du canton servait jadis de terrain de hockey en hiver et accueillait au printemps les oiseaux migrateurs qui, le temps d’une saison, devenaient eux aussi résidents du territoire. Le bord de mer, quant à lui, fut le témoin de l’époque où les quais grouillaient d’activité et où le travail des pêcheurs dictait le rythme de la vie locale.
Aujourd’hui encore, alors que certains sites disparaissent sous l’effet de l’érosion ou de l’activité humaine, il devient essentiel de préserver ces joyaux naturels et de perpétuer leur histoire. Car si les paysages évoluent, l’attachement des Madelinots à leurs buttes et à leurs cantons, lui, demeure intact.