Le homard est débarqué en grande quantité en Gaspésie et aux Îles de la Madeleine, mais les prix sont en baisse en raison de la saturation des marchés. C’est le constat que dresse l’industrie, alors que le tiers de la saison de pêche est déjà écoulé.
Le prix versé aux homardiers gaspésiens et madelinots a chuté rapidement : de 8,13 $/lb lors de la première semaine de pêche à 6,76 $/lb la semaine dernière.
Il s’agit du prix le plus bas offert aux homardiers de la région à ce point-ci de la saison depuis 2020, année marquée par la pandémie de COVID-19.
Le directeur de l’Office des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine, Rolland Turbide, est étonné et déçu de cette baisse rapide des prix en début de saison.
Ça nous surprend, parce que l’hiver passé, il y avait une terrible demande pour le homard, affirme M. Turbide. Le prix sur les marchés a monté au-dessus de 20 $ la livre cet hiver et là, ça a chuté.
Selon une étude réalisée par l’Office, le seuil de rentabilité pour un homardier madelinot est de 7,49 $/lb. Le prix versé aux pêcheurs la semaine dernière est donc de 0,73 $ inférieur au coût de production.
Du homard qui inonde le marché
En trois semaines, les 325 homardiers madelinots ont déjà débarqué plus de 6,5 millions de livres de homards, soit une hausse de 1,4 % par rapport à la saison record de l’an dernier.
Les pêcheurs de Terre-Neuve et du nord de la Nouvelle-Écosse connaissent aussi une saison exceptionnelle, mais l’industrie peine à trouver preneurs pour ces prises abondantes. Au Cap-Breton, la situation est telle que certains industriels stockent les crustacés à même l’eau de mer, faute d’espace dans leurs viviers.

Le vice-président de l’entreprise de transformation E. Gagnon et fils, Bill Sheehan, explique qu’il peine à vendre son homard à bon prix ces jours-ci. (Photo d’archives) PHOTO : RADIO-CANADA / MARTIN TOULGOAT
Cette abondance de homard sature les marchés et tire les prix à la baisse. Si les consommateurs peuvent s’en réjouir, la situation est préoccupante pour les acteurs de l’industrie en Gaspésie et aux Îles.
C’est certain que ça met beaucoup de pression sur les marchés pour écouler le stock. Quand tout le monde en a et ne sait plus quoi faire avec leurs stocks, il se fait du dumping.
Le vice-président de l’entreprise de transformation E. Gagnon et fils de Sainte-Thérèse-de-Gaspé, Bill Sheehan, admet qu’il doit écouler ses stocks à bas prix ces jours-ci afin de libérer de l’espace dans ses viviers.
Je ne manque pas de place, mais j’ai dû travailler dimanche pour faire des ventes, ce que je ne fais pas d’habitude
, explique M. Sheehan. Je dois parfois vendre sans faire de profit pour me libérer de l’espace.

La Coopérative des pêcheurs de Cap Dauphin achète les prises de 97 des 325 homardiers des îles de la Madeleine. (Photo d’archives) PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE
La directrice générale de la Coopérative des pêcheurs de Cap Dauphin à Grosse-Île, aux îles de la Madeleine, souligne elle aussi que les ventes ont ralenti depuis quelques jours.
En plus de l’abondance du homard de Terre-Neuve et du Cap-Breton, Ruth Taker mentionne que les restaurateurs américains sont moins friands du crustacé depuis quelques mois.
Les Américains ont payé 20 $/lb ou plus pour le homard cet hiver, donc dans plusieurs restaurants, ils ont enlevé le homard de leur menu, parce que les gens trouvaient ça trop cher, explique Mme Taker. Ça n’aide pas la situation actuelle.
Remontée des prix espérée
Bien qu’ils jugent que la situation ne soit pas encore alarmante, tant les pêcheurs que les industriels gaspésiens et madelinots espèrent un rééquilibrage entre l’offre et la demande, afin que les prix de vente repartent à la hausse pour la deuxième moitié de saison.
La fin de la pêche vendredi dans une importante zone de la Nouvelle-Écosse de même que la réduction normale des captures au fil de la saison devraient aider à réduire l’offre, tandis que la demande devrait être gonflée par les célébrations qui arrivent, dont la fête des Pères, la fête du Canada et celle de l’Indépendance américaine.
LA UNE : Bien que les prix versés aux homardiers gaspésiens et madelinots connaissent habituellement une baisse durant la première moitié de la saison, la chute est particulièrement importante et rapide cette année. (Photo d’archives) PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE
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