Pour une troisième année de suite, les pêcheurs ont battu un record avec plus de 16 millions de livres (un peu plus de 7,2 millions de kilogrammes) de homards débarquées sur les quais de l’archipel. La saison 2024 ne passera toutefois pas à l’histoire pour ce qui est des prix versés aux pêcheurs.
Selon les chiffres fournis par l’Office des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine (OPHIM), les homardiers madelinots ont ramené à quai 16 144 572 livres de homard durant la saison 2024 qui s’est terminée samedi.
Il s’agit d’une hausse des débarquements de 6,6 % comparativement à 2023, une année record.
La valeur totale des prises s’élève à 114,4 M$. En comparaison, la valeur moyenne cumulative des débarquements de 2015 à 2021 frôlait les 56 M$, pour une moyenne d’environ 9 400 000 livres (soit un peu plus de 4,2 millions de kilogrammes), ce qui témoigne de la hausse marquée des prises autour de l’archipel dans les dernières années.

Les homardiers sont rentrés à quai chargés de cages samedi matin. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE
Globalement, les pêcheurs se disent satisfaits de la saison, bien qu’ils soient déçus des prix qui leur ont été versés par les six acheteurs de l’archipel.
Le prix moyen pondéré pour la saison 2024 s’établit à 7,09 $/lb.
On a un super beau bilan côté prises, mais côté prix, on a eu une baisse de 7,6 % par rapport à l’an passé.
Le prix moyen pondéré versé aux pêcheurs madelinots n’a jamais été aussi bas depuis la saison 2020, marquée par la pandémie de COVID-19, alors que les dépenses des pêcheurs sont en hausse.

Lors de la dernière journée de pêche, les pêcheurs doivent rapporter à quai leurs 273 trappes à homard respectives. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE
Les débarquements augmentent tout le temps, comme on le voit, donc c’est certain que ça fait beaucoup de homards sur le marché
, explique la directrice de l’OPHIM, Nadine Cyr. On nous dit que les marchés, partout au Canada, étaient pleins cette saison. Les acheteurs ont probablement eu de la misère et ont vendu pour un moindre prix.
Le 21 juin, les homardiers madelinots ont fait une sortie publique pour dénoncer le fait qu’ils obtenaient un prix inférieur à celui que reçoivent les pêcheurs de l’Île-du-Prince-Édouard et du Cap-Breton.
Les prix versés aux pêcheurs des Îles ont fluctué entre 6,16 $/lb et 8,13 $/lb durant les neuf semaines de pêche.
Le prix a remonté au cours des trois dernières semaines, sauf qu’il a été bas pour plusieurs semaines
, déplore la directrice de l’OPHIM, Nadine Cyr.

Les 325 pêcheurs de homards de l’archipel obtiennent tous les mêmes prix lors des neuf semaines de pêche, en vertu du Plan conjoint des pêcheurs de homards des Îles-de-la-Madeleine. Six acheteurs de homards font partie de cette convention. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE
Nadine Cyr souligne que le prix moyen pondéré de la saison 2024 est inférieur de 0,40 $/lb au seuil de rentabilité fixé à 7,49 $/lb, selon une étude menée par l’Office en 2023.
C’est sûr que tous les pêcheurs n’ont pas le même taux d’endettement, mais c’est certain que ça sera moins facile pour certains
, note-t-elle

Les pêcheurs madelinots auraient espéré obtenir des prix plus élevés. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE
Le capitaine Marc Landry s’inquiète pour les jeunes pêcheurs qui commencent leur carrière.
On est en dessous du seuil de rentabilité
, déplore-t-il. Pour moi, ce n’est pas trop problématique, parce que ça fait une quinzaine d’années que j’ai mon bateau et je n’ai pas payé cher. Je suis capable d’absorber ça, parce que je n’ai pas de gros paiements.
Pour les jeunes, avec les dépenses, le prix du carburant et des appâts qui montent, mais le prix du homard qui est stable ou en baisse, ce n’est pas intéressant.

Le capitaine du Manibel, Marc Landry, se dit préoccupé par la santé financière des jeunes entreprises de pêche, étant donné que le prix moyen pondéré de la saison 2024 est sous le seuil de rentabilité de 7,49 $/lb. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE
De son côté, le capitaine et vice-président de l’OPHIM, Alexandre Bourgeois, croit qu’il serait avantageux pour les pêcheurs d’avoir plus de six acheteurs de homard aux Îles, considérant les hausses des débarquements.
Ça créerait une petite compétitivité entre chacun des acheteurs et ça ferait que chacun aurait de moins grosses quantités de homard à retenir, donc je pense que ça pourrait jouer en notre faveur s’il y avait des acheteurs de plus
, affirme M. Bourgeois.

Le capitaine et vice-président de l’OPHIM, Alexandre Bourgeois, croit qu’il faudrait plus que six acheteurs de homards dans l’archipel pour hausser les prix versés aux pêcheurs. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE
En février, le ministère l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) a officiellement refusé la demande de permis d’acquéreur de produits marins déposée par la Coopérative des pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine.
Un temps exceptionnel
Malgré leur déception concernant les prix, les pêcheurs soulignent les conditions météorologiques très favorables durant la saison de pêche.
Chose rare, la grande majorité des pêcheurs n’ont pas eu à rester à quai une seule journée en raison du mauvais temps.
Je tiens un registre chaque année et c’est la première fois depuis longtemps qu’on n’a pas vu ça. Je n’ai pas perdu une seule journée de pêche
, rapporte le capitaine Bernard Vigneau. Cette année, c’est exceptionnel!

« La température a été excellente pour nous, mais les prix sont à discuter », croit le capitaine Bertrand Vigneau. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE
Le président de l’Office des pêcheurs attribue d’ailleurs les prises historiques de 2024, en partie, à la météo.
Dame Nature était très favorable, ça joue sur les débarquements
, indique-t-il. Il y a des années où les pêcheurs du nord des Îles doivent rester à quai une dizaine de jours en raison du mauvais temps.
LA UNE : La valeur des débarquements de homards aux îles de la Madeleine dépasse les 114 millions de dollars. PHOTO : RADIO-CANADA / ISABELLE LAROSE
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