Amputé après une attaque de requin, un surfeur de l’Î.-P.-É. raconte son histoire

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Il y a sept mois, le surfeur cerf-voliste professionnel Lucas Arsenault, originaire de la région Évangéline à l’Île-du-Prince-Édouard, a été attaqué par un requin lorsqu’il faisait de la plongée en apnée dans les Caraïbes. Sa jambe droite a été amputée. Malgré les difficultés, l’athlète est déjà remonté sur sa planche.

En mai 2024, Lucas Arsenault, 27 ans, se rend aux îles Turks et Caicos. Il connaît bien l’endroit : il a nagé dans ces eaux des centaines de fois, dans le cadre de son travail.

Mais cette fois, les choses se passent différemment.

Je me suis fait percuter très fort dans les côtes, raconte-t-il, croyant à cet instant qu’il s’agissait d’un bateau.

Et là, je me suis retourné, et j’ai vu la tête d’un requin.

Une citation de Lucas Arsenault

Selon Lucas Arsenault, le requin était environ de deux à trois mètres de long. Le requin s’est accroché à son genou droit et s’est mis à secouer le jeune homme sous l’eau.

Je sentais ma peau se déchirer. La force de ses dents était si puissante que j’entendais mes os se broyer, relate-t-il.

Il se souvient d’avoir pensé à ce moment : Oh mon Dieu! J’ai 27 ans, mais ça y est, ma vie est finie.

Lucas Arsenault fait du kite surf. Il a la tête à l’envers, devant un paysage estival où l’on aperçoit un cours d’eau et des éoliennes.

Avant son accident, Lucas Arsenault a parcouru le monde pour pratiquer et enseigner son sport. Photo : Gracieuseté : Lucas Arsenault

Lucas Arsenault a tenté de donner un coup de poing au requin et même de lui ouvrir la gueule. En vain.

Après quelques secondes, il parvient finalement à lui faire lâcher prise en lui donnant des coups dans les yeux.

Derniers instants

L’attaque n’a duré que 30 secondes, mais Lucas Arsenault a eu l’impression qu’elle a duré une éternité. Une fois de retour sur le bateau, Lucas Arsenault se souvient d’avoir regardé sa famille à ce moment en se disant : ce sont mes derniers instants.

Je me demandais : comment va se passer [la mort]? À quel moment? Est-ce que je vais juste m’évanouir? Je veux seulement partir en douceur, poursuit Lucas Arsenault.

Un couple prend la pose devant un soleil et l'océan aux îles Turks et Caicos.

Lucas Arsenault et Jory MacIsaac, sa copine, qui lui a fait un garrot pour limiter l’hémorragie une fois qu’il était de retour sur le bateau. Photo : Gracieuseté : Lucas Arsenault

Une fois à l’hôpital, l’opération dure neuf heures. On lui ampute la jambe droite, jusqu’en haut du genou. On lui répare des tendons ainsi que les nerfs endommagés de ses membres restants avec lesquels il avait tenté d’ouvrir la gueule du requin.

Je me souviens d’avoir à un moment ouvert les yeux et, après m’être battu si longtemps pour ma vie, je n’arrivais même plus à bouger un doigt. J’étais complètement épuisé.

Lucas Arsenault dans un lit d'hôpital fait un signe de la main.

Lucas Arsenault ne s’explique pas comment il a pu garder un souvenir si vif de son accident et de son passage à l’hôpital. (Photo d’archives) Photo : Facebook : Lucas Arsenault

Après l’opération, son corps entier lui faisait mal et l’incertitude par rapport à l’avenir a envahi son esprit. C’était une période très sombre, confie-t-il.

C’est impossible d’empêcher mon esprit de ne pas aller dans tous les sens. Est-ce que je vais réussir à reconduire un jour? Comment vais-je faire pour aller aux toilettes la nuit?

Une fois que son état de santé a été stabilisé, Lucas Arsenault a pu être rapatrié au Canada où il a été hospitalisé pendant près d’un mois à Toronto.

Lucas Arsenault, en fauteuil roulant et habillé de la chemise d'hôpital, entouré de sa famille souriante.

Lucas Arsenault et sa famille à Toronto, quatre semaines après l’attaque de requin. Photo : Gracieuseté : Lucas Arsenault

Une vague de soutien de ses proches, mais aussi de la communauté des cerfs-volistes et de l’Île-du-Prince-Édouard l’a submergé.

Retour sur un surf, trois mois après l’attaque

Dix semaines après son amputation, il a refait ses premiers pas. Se sont ensuivies des centaines d’heures de rééducation avec une équipe médicale pour réapprendre à être actif, différemment. Sa rééducation se poursuit encore aujourd’hui, maintenant qu’il est de retour à Summerside.

Lucas Arsenault à la salle d'entraînement. Il saisit la barre à deux mains et se tire vers le haut.

Lucas Arsenault s’entraîne presque tous les jours au gym depuis l’attaque. Il veut reprendre des forces. Photo : Lisa Xing/CBC

Et trois mois seulement après l’attaque, en septembre, Lucas Arsenault était déjà de retour sur un surf cerf-volant. Il ne pensait pas que ça serait possible un jour. J’ai été submergé par une vague d’émotions, dit-il.

Ce ne sera plus jamais comme avant, mais il reste que j’ai la chance de pouvoir encore en faire.

Lucas Arsenault s’adapte graduellement à sa nouvelle vie. Le matin est toujours le moment le plus pénible : quand il réalise qu’il ne peut pas sortir du lit aussi facilement qu’avant. Puis, il se souvient de la chance qu’il a d’être en vie.

Pour faire la paix avec le passé, il est retourné aux îles Turks et Caicos avec ses proches en novembre. Un moment émouvant, dit-il.

Gros plan de la jambe amputée d’un surfeur et de son vêtement en main adapté à sa blessure.

Lucas Arsenault a coupé à contrecœur les jambes droites de ses combinaisons de plongée pour les adapter à sa prothèse de jambe. Photo : Lisa Xing/CBC

Même s’il ne refera pas de plongée en apnée pendant un bon moment — voire jamais — Lucas Arseneault dit ne rien regretter de cette journée.

J’ai déjà assez perdu d’énergie physique, je ne veux pas en perdre d’autres ailleurs, explique celui qui a décidé de ne garder que le positif.

Si tu affrontes un requin-tigre de 1000 livres et tu réussis à t’en sortir, c’est ce que j’appelle une fin plutôt heureuse.

LA UNE : Lucas Arsenault a perdu sa jambe droite lors d’une attaque de requin à la fin mai. Photo : Lisa Xing/CBC

PAR Radio-Canada d‘après le reportage de Lisa Xing, CBC