Des modules ondulés, fabriqués à partir de coquilles d’huîtres intégrées dans du béton pour pallier l’érosion côtière. C’est le fruit du travail de deux finissants au baccalauréat en design de produits de l’Université Laval, qui se sont intéressés à ce problème qui touche les communautés côtières du fleuve Saint-Laurent.
La plantation de végétaux, l’enrochement, les brise-lames ou même la recharge de plage font partie de moult solutions utilisées pour freiner l’érosion des berges.
Ludovic Turgeon-Arsenault et Mathieu Blanchette ont voulu imaginer d’autres solutions plus innovantes, mais surtout plus écologiques.
On a fait une grosse base de recherches et à 97 % au Québec ce sont des enrochements, des murs de protection en béton, donc des infrastructures grises, qui sont couramment utilisées. De l’autre côté du spectre, on a les solutions basées sur la nature, donc planter des écosystèmes comme protection côtière, mais ça demande beaucoup d’espace pour se développer
, explique Mathieu Blanchette.
C’est de là que Tecora est né.
C’est autant une solution qui va utiliser la nature et les écosystèmes pour protéger, mais tout en étant une infrastructure rigide en même temps, en utilisant un matériau plus écologique que le béton
, fait-il valoir.
Ce matériau en question est le béton d’huîtres
, conçu par les deux acolytes. Cette innovation pourrait réduire l’empreinte carbone du béton traditionnel de 40 à 60 %, selon eux.
On vient ajouter des agrégats d’huîtres et une poudre [de coquilles] d’huîtres dans le béton
, précise Ludovic Turgeon-Arsenault.

La présence de coquilles d’huître dans ce béton favoriserait son implantation dans les écosystèmes côtiers, ce qui ferait en sorte qu’au bout d’un certain temps, les modules commenceraient à se végétaliser, avec des algues, de la mousse et des animaux qui vont venir y habiter
, poursuit M. Turgeon-Arsenault.
Le secret : le carbonate de calcium, principale composante des coquilles d’huîtres, qui se retrouve naturellement sur les berges du Saint-Laurent, renchérit Mathieu Blanchette.
L’idée, c’est vraiment de redonner vie, redonner une chance aux écosystèmes de s’épanouir, tout en ayant une protection contre l’érosion.
Vers une commercialisation?
Avec ce projet, Ludovic Turgeon-Arsenault et Mathieu Blanchette se sont vu remettre deux prix dans le cadre des prix et bourses 2025 pour les finissantes et finissants en design graphique et design de produits de l’Université Laval.
Les deux finissants ont remarqué l’engouement pour leur projet.
C’est quelque chose qu’on aimerait voir sur le marché, parce que ça vient répondre à un problème, mais c’est sûr que ça demanderait énormément de temps et d’argent comme produit à développer
, indique Ludovic Turgeon-Arsenault.

S’ils sentent que l’avenir pourrait s’annoncer prometteur pour Tecora, les designers admettent qu’il reste encore quelques tests à faire. Leur produit n’est pour le moment pas destiné à tous les types de terrains.
Dans le cadre du projet, ils se sont surtout intéressés à des endroits plats, comme le bas de plages, par exemple.
C’était dur de faire une structure qui pouvait répondre à tous les types de berges, comme les falaises plus à pic des Îles-de-la-Madeleine, ou encore des berges plus rocheuses
, concède Mathieu Blanchette.
Il n’est cependant pas impossible, selon lui, de mettre éventuellement au point d’autres types de structures pour répondre aux besoins de différentes régions côtières.
LA UNE : Les modules de Tecor, d’une taille de 90 centimètres, ont une forme biomorphique qui rappelle des alvéoles ou des hélices de bateaux, et comprennent des trous pour laisser passer l’eau. PHOTO : LUDOVIC TURGEON-ARSENAULT ET MATHIEU BLANCHETTE