Aux Îles-de-la-Madeleine, le rapport d’enquête du ministère de l’Environnement sur l’état de l’oléoduc d’Hydro-Québec au moment du déversement en 2014, suscite bien des réactions. Les gens ignoraient que l’oléoduc était à ce point usé par la corrosion.

Sur l’Archipel, des rumeurs laissaient entendre que l’oléoduc était dans un mauvais état, surtout depuis la fuite qui a laissé s’écouler plus de 100 000 litres de diesel dans la nature à l’automne 2014.
Toutefois la porte-parole de l’Association madelinienne pour la sécurité énergétique et environnementale, Marianne Papillon, est surprise par l’ampleur de la corrosion. Le rapport fait état de 6498 anomalies, en plus de pertes d’épaisseur de métal pouvant aller jusqu’à 90% sur la tuyauterie.
«Je pense qu’Hydro-Québec en doit une à la collectivité, surtout en soutenant la politique énergétique des Îles de la Madeleine qui est en élaboration en ce moment.» – Marianne Papillon, porte-parole de l’Association madelinienne pour la sécurité énergétique et environnementale
Même son de cloche pour le président d’Escale Îles-de-la-Madeleine, Gino Thorn qui se désole de voir la zone d’accueil des croisiéristes transformée en un vaste chantier de décontamination.
«Très surprenant de voir qu’il y a eu tant d’anomalies soulevées sans une réaction d’Hydro-Québec au préalable» – Gino Thorne, président d’Escale Îles-de-la-Madeleine
Augmentation des tarifs d’électricité?
L’analyste, politiques et réglementation en matière d’énergie pour l’Union des consommateurs, Marc-Olivier Moisan-Plante, rappelle qu’Hydro-Québec a demandé deux fois à la Régie de l’énergie que les coûts de nettoyage du déversement des Îles, 20 millions de dollars, soient absorbés dans l’augmentation des tarifs d’électricité. M. Moisan estime que cette somme aurait représenté une augmentation de tarif d’environ 0,2 % en 2016.
La Régie de l’énergie a refusé à chaque fois les demandes d’Hydro-Québec. La dernière fois, elle attendait le dépôt du rapport du ministère de l’Environnement avant de se prononcer. Selon M. Moisan-Plante, Hydro-Québec aurait retiré cette demande à la fin de la dernière année, toutefois, il craint que la société d’État revienne à la charge.
« Hydro-Québec devrait avoir de bonnes pratiques environnementales. C’est le principe aussi du pollueur payeur et malheureusement, si Hydro-Québec est responsable du déversement je pense qu’elle devrait en assumer les coûts et non pas de demander à sa clientèle de les rembourser. » dit-il.
«Le premier réflexe d’Hydro c’est de faire payer ses clients, c’est désolant» – Marc-Olivier Moisan-Plante, analyste, politiques et réglementation en matière d’énergie pour l’Union des consommateurs
Rencontre avec Hydro-Québec

Le maire des Îles-de-la-Madeleine, Jonathan Lapierre, demande une rencontre avec Hydro-Québec sur l’état de l’oléoduc.
Monsieur Lapierre affirme toutefois être étonné par la nature de certaines informations, comme le fait que la société d’État était au courant des anomalies.
« Hydro-Québec n’avait pas de plan de mesure d’urgence adéquat, par exemple pour faire face à une telle situation, dénonce-t-il. Un test d’étanchéité avait été fait dans l’oléoduc et au moment où on a décelé une anomalie importante, la première réaction n’a pas été de vérifier l’étanchéité même de l’oléoduc, mais on a laissé couler dans la nature, 100 000 litres [de diesel]. »
«Alors, c’est extrêmement fâchant et je vous dirais que c’est extrêmement décevant.» – Jonathan Lapierre, maire des Îles-de-la-Madeleine

Selon le rapport, dès 2003, une firme spécialisée avait décelé des problèmes. Il est écrit aussi que le système de protection cathodique ne répondait plus aux normes, 9 mois avant la fuite. Toutefois, nulle part le mot négligence n’est écrit.
Rappelons qu’Hydro-Québec a plaidé coupable d’avoir rejeté des matières dangereuses dans l’environnement.
Un texte de Jean-François Deschênes d‘après les informations de Michel-Félix Tremblay
LA UNE : Une employée d’Hydro-Québec montre une partie des puits de décontamination pour récupérer les hydrocarbures PHOTO : ICI RADIO-CANADA