Des institutions de la Gaspésie et du Bas-Saint-Laurent répondent à l’appel de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) de boycotter vendredi certaines plateformes de Meta.
Plusieurs élus, organismes gouvernementaux et entreprises de la région participent à ce boycottage intitulé Journée sans Meta, qui consiste à ne pas consulter Facebook et Instagram et à ne rien y publier.
Parmi les institutions qui participent à l’initiative, on compte les Chambres de commerce du Bas-Saint-Laurent, le CISSS de la Gaspésie, la Ville de Gaspé ou encore le cégep de Matane.
Des élus régionaux participent également, dont le député de Gaspé, Stéphane Sainte-Croix, le député de Matane-Matapédia, Pascal Bérubé et la ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, Diane Lebouthillier.
Pour sa part, la Municipalité des Îles-de-la-Madeleine ne participera pas au boycottage en raison de l’arrivée de la tempête post-tropicale Lee dans la région en fin de semaine. |
Un boycottage contre « l’intimidation » de Meta
L’initiative de la FPJQ vise à dénoncer la décision de l’entreprise américaine de suspendre la diffusion de nouvelles canadiennes sur ses plateformes.
Meta évite ainsi de verser des compensations aux médias, comme le prévoit la loi C-18 sur les nouvelles en ligne, qui doit entrer en vigueur en décembre.
La FPJQ a choisi le 15 septembre qui est la Journée internationale de la démocratie, pour tenir ce boycottage.
C’est pour envoyer le message que la population canadienne ne va pas accepter qu’une entreprise américaine vienne dire au gouvernement quelle loi elle peut ou pas passer
, explique le président de la FPJQ, Michaël Nguyen.
Pour la présidente de la FPJQ, section Est-du-Québec, Johanne Fournier, une telle journée démontre l’importance d’exprimer son désaccord vis-à-vis la façon de faire de l’entreprise.
Soyez de bons citoyens corporatifs! On vous fournit du contenu, que vous réussissez à monétiser. On vous demande de verser une infime redevance qui ne vous mettra pas en péril, contrairement à des médias qui ne cessent de disparaître
, lance-t-elle à Meta.
Johanne Fournier cite en exemple la fermeture du journal Métro, à Montréal.
Le milieu économique mobilisé
L’ensemble des Chambres de commerce du Bas-Saint-Laurent participent à ce boycottage à l’initiative de la Chambre de commerce de la Matapédia.
Le directeur général de la Chambre de commerce et d’industrie de la Matanie estime qu’il s’agit d’un effort de groupe pour démontrer que les acteurs économiques régionaux sont solidaires des médias.
Je crois profondément que les gens sont attachés à leur média. Ils savent à quel point c’est important de pouvoir avoir sur le terrain des journalistes qui parlent de nous au quotidien. À chaque fois qu’un média meurt, c’est une partie de notre région qui s’efface
, explique Denis Lévesque, qui a eu une carrière de journaliste.
Contourner le blocage des nouvelles
Face au blocage du contenu des médias canadiens sur les plateformes de Meta, les médias de la région ont été forcés de s’adapter.
Certains journalistes pratiquent une forme de contournement du blocage de Facebook. C’est le cas par exemple de Nelson Sergerie, journaliste pigiste pour différents médias de la Gaspésie, notamment à la station de radio CHNC ou encore pour le site magaspesie.ca.
Le journaliste confirme avoir créé à la mi-août une page Facebook intitulée : Fans des nouvelles de la Gaspésie par Nelson Sergerie, sur laquelle il partage ses nouvelles. Il ajoute le lien URL de ses articles dans les commentaires de la publication.
Nelson Sergerie explique utiliser ce subterfuge pour continuer à rejoindre son auditoire.
Il y avait des fans assidus sur les pages d’actualité sur lesquelles je publie. Comme on ne pouvait plus le faire avec les médias avec lesquels je travaille, j’ai créé cette alternative qui fonctionne jusqu’à maintenant
, explique-t-il.
Le journaliste gaspésien rappelle que les sites internet des médias fonctionnent toujours. Et c’est surtout là-dessus qu’il faut miser pour le futur, soutient-il. On se rend compte que ce n’était pas l’idée du siècle [de partager nos contenus sur les médias sociaux].
Se désengager des réseaux sociaux
Au contraire, la direction de la radio CHNC a choisi un désengagement total des plateformes de Meta.
Le directeur général de la station, Georges Daviault dit vouloir concentrer les efforts de ses équipes ailleurs, notamment sur le 90e anniversaire du média.
Le gestionnaire se dit déçu du manque de solidarité des élus et des formations politiques sur la question, alors que plusieurs partis s’étaient désolidarisés d’un boycottage lancé cet été contre Meta et ses plateformes.
Il demande à ce que l’ensemble des ordres de gouvernement investissent leur budget publicitaire dans les médias locaux, régionaux et nationaux au lieu de le dépenser sur les réseaux sociaux.
Par ailleurs, il propose une rencontre des médias locaux du Québec afin de se mobiliser et de trouver des solutions à cette problématique.
LA UNE : La Fédération professionnelle des journalistes du Québec appelle au boycottage des plateformes de Meta vendredi. (Photo d’archives). PHOTO : AFP VIA GETTY IMAGES / LIONEL BONAVENTURE
PAR Pierre Chapdelaine de Montvalon