La glace sur le Saint-Laurent se fait attendre, encore une fois

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Pour un cinquième hiver consécutif, le couvert de glace tarde à se former sur le fleuve Saint-Laurent. La tendance des dernières années, où l’englacement est plus faible que la normale, défie même les projections scientifiques.

Le fleuve est très en retard cette année. On n’a presque pas de glace, résume sans équivoque Peter Galbraith. Le chercheur en océanographie physique à l’Institut Maurice-Lamontagne regarde le Saint-Laurent et en pointe la côte, à peine gelée et par-delà laquelle s’étend le fleuve, liquide et bleu. Vous le voyez, c’est de l’eau.

En cause : un mois de décembre chaud marqué par des pluies.

Les données du Service canadien des glaces, dont les relevés remontent à 1969, attestent que le couvert de glace est nettement sous la moyenne saisonnière. Les bulletins journaliers, émis quant à eux depuis 2009, montrent que le volume de glace est, à pareille date, le troisième plus faible enregistré.

La berge englacée du le fleuve Saint-Laurent.

Au large de Rimouski, le Saint-Laurent coule dénué de glace. PHOTO : RADIO-CANADA / MARIE-CHRISTINE RIOUX

On devrait avoir l’estuaire gelé au grand complet, précise Peter Galbraith. Si on regarde la carte des glaces d’hier, il n’y a pratiquement rien à la grandeur du golfe du Saint-Laurent, sauf un petit peu de glace sur les berges du Bas-Saint-Laurent et de la Basse-Côte-Nord.

Le redoux et les pluies du mois de décembre ont mis un frein à l’englacement du Saint-Laurent. Peter Galbraith explique que l’air froid est primordial pour figer les eaux du fleuve, qui elles-mêmes doivent être sous le point de congélation.

Or ce n’est pas le cas. Des mesures effectuées la semaine dernière par le chercheur indiquent que la température du fleuve est toujours de 1,5 degré Celsius. L’air froid, quant à lui, se fait attendre. Malgré une baisse du mercure prévue pour les prochains jours, le redoux qui suivra n’augure rien de bon. ou -5degrés à Rimouski, ce ne sera pas suffisant pour former de bons couverts de glace","text":"-4ou -5degrés à Rimouski, ce ne sera pas suffisant pour former de bons couverts de glace"}}">-4 ou -5 degrés à Rimouski, ce ne sera pas suffisant pour former de bons couverts de glace, précise-t-il.

On ne pourra pas avoir un hiver rempli de glace mur à mur dans le golfe du Saint-Laurent. Il est déjà trop tard pour ça.

Une citation dePeter Galbraith, océanographe à l’Institut Maurice-Lamontagne
Peter Galbraith, chercheur en océanographie physique chez Pêches et Océans Canada

Selon Peter Galbraith, la glace côtière devrait déjà s’étendre jusqu’à Sainte-Anne-des-Monts, en Gaspésie, et à Sept-Îles, sur la Côte-Nord. (Photo d’archives) PHOTO : RADIO-CANADA / FRANÇOIS GAGNON

Toutefois, l’hiver pourrait encore surprendre. C’est tellement dur à prévoir, parce que c’est relié à la météo à court terme, explique Peter Galbraith. En dedans de quelques semaines, on pourrait rattraper un grand retard, surtout si l’eau atteint le point de congélation.

La pêche sur glace retardée

Pour les pêcheurs sur glace, cela signifie que la saison sera fort probablement écourtée. C’est d’ailleurs le cas depuis quelques années, fait remarquer Gaston Dionne de l’Association des pêcheurs d’éperlans de la rivière Rimouski (APER).

APER, en2000, jusqu’à2015, il y a eu des cabanes à chaque année sur la banquise et la saison débutait relativement tôt, au début janvier. Puis en2017 et2021, on n’a pas pu mettre de cabane sur la banquise, parce que le pont de glace ne s’était pas construit. L’année passée, on a commencé très tard, le 7février","text":"De la création de l’APER, en2000, jusqu’à2015, il y a eu des cabanes à chaque année sur la banquise et la saison débutait relativement tôt, au début janvier. Puis en2017 et2021, on n’a pas pu mettre de cabane sur la banquise, parce que le pont de glace ne s’était pas construit. L’année passée, on a commencé très tard, le 7février"}}">De la création de l’APER, en 2000, jusqu’à 2015, il y a eu des cabanes à chaque année sur la banquise et la saison débutait relativement tôt, au début janvier. Puis en 2017 et 2021, on n’a pas pu mettre de cabane sur la banquise, parce que le pont de glace ne s’était pas construit. L’année passée, on a commencé très tard, le 7 février, raconte-t-il.

Gaston Dionne se tient près de la banquise à Rimouski.

Gaston Dionne appelle à la prudence sur les glaces du fleuve, qui tardent à épaissir. PHOTO : RADIO-CANADA / MARIE-CHRISTINE RIOUX

Gaston Dionne a bon espoir d’établir sa cabane d’ici la fin du mois, alors que la saison de pêche blanche s’étire normalement de la mi-janvier à la mi-février.

Il croise les doigts pour que le thermomètre affiche -15 degrés Celsius, un froid qui, espère-t-il, permettra d’obtenir un pont de glace sécuritaire d’une vingtaine de centimètres entre l’embouchure de la rivière Rimouski et l’île Saint-Barnabé.

Or pour l’instant, il estime que l’épaisseur de glace, apparue cette semaine, avoisine les 12 centimètres, ce qui est trop mince même pour y pêcher sans cabane.

Une cabane de bois se dresse sur la berge englacée du fleuve. Au loin, l'Île Saint-Barnabé.

Le pont de glace jusqu’à l’île Saint-Barnabé n’est pas encore formé, ce qui rend la banquise de Rimouski vulnérable aux grandes marées. PHOTO : RADIO-CANADA / MARIE-CHRISTINE RIOUX

Les observations devancent les prévisions

À savoir ce que l’hiver en cours et les précédents augureront pour ceux à venir, Peter Galbraith ne se fait pas d’illusion. C’est ce qui est prévu avec les changements climatiques, mais dans un ordre de temps qui est quand même assez grand. On parle d’une centaine d’années pour voir des conditions moyennes sans glace et des hivers occasionnels avec un couvert de glace.

Le chercheur s’étonne tout de même de la rapidité du changement. Les statistiques sont en train de démentir les prévisions, parce que durant les cinq dernières années, on a eu des couverts de glace très tardifs. Ce n’est pas du tout aléatoire ce qu’on vit présentement.

Sans compter que le recul du couvert de glace expose davantage les berges aux grandes marées, les rendant vulnérables à l’érosion.

Peter Galbraith tempère les conséquences d’un englacement tardif du fleuve. Le golfe est déjà exposé à des épisodes de grosses vagues en dehors de la période de glace. Donc on ne fait qu’augmenter la pression sur le système quand il y a une absence de glace.

Le chercheur rappelle que 2023 est passé près d’être le sixième sans glace et de rejoindre le triste palmarès formé par 1958, 1969, 2010, 2011 et 2021. Ça devient tranquillement une nouvelle climatologie et une nouvelle réalité.

LA UNE : Le couvert de glace sur le fleuve Saint-Laurent est l’un des plus minces des dernières années. PHOTO : RADIO-CANADA / MARIE-CHRISTINE RIOUX

PAR vec les informations de Marie-Christine Rioux