Un décret du président Trump sur la pêche inquiète des intervenants en Atlantique

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Scientifiques, environnementalistes et transformateurs disent être nerveux à la suite d’un décret signé jeudi par le président Donald Trump visant à stimuler l’industrie de la pêche aux États-Unis.

Avec ce décret, Donald Trump demande au secrétaire du Commerce, Howard Lutnick, de s’attaquer à ce qu’il estime être une surréglementation dans le secteur de la pêche.

M. Trump espère ainsi augmenter la production de l’industrie de la pêche et promouvoir les produits de la mer aux États-Unis et ailleurs dans le monde.

Donald Trump et Howard Lutnick.Donald Trump a signé jeudi un décret visant à stimuler la pêche commerciale aux États-Unis. Photo : Associated Press / Alex Brandon

Pour y parvenir, il ouvre notamment la porte à lever l’interdiction de pêcher dans des aires marines protégées.

Il souhaite aussi mettre fin à un déficit commercial dans le secteur des pêches.

Près de 90 % des fruits de mer sur nos rayons sont importés et le déficit commercial dans ce secteur s’élève à plus de 20 milliards de dollars, peut-on lire dans le décret publié par la Maison-Blanche. L’érosion de la compétitivité des produits de la mer américains due à des pratiques commerciales étrangères déloyales doit cesser.

Donald Trump veut également augmenter les exportations et demande qu’une stratégie commerciale pour les produits de la mer soit élaborée dans les 60 prochains jours.

Inquiétude pour les écosystèmes marins

Pour la biologiste marine Lyne Morissette, ce décret du président américain, bien que flou, est inquiétant.

Lyne Morissette à l'émission On va se le dire.Lyne Morissette estime que les détails entourant le décret de Donald Trump demeurent flous, mais inquiétants. (Photo d’archives) Photo : Pamplemousse média

Quand on parle de rouvrir des aires marines protégées pour retourner pêcher là-bas, c’est très mal comprendre le fonctionnement d’un écosystème, dit celle qui est aussi professeure associée à l’Institut des sciences de la mer de Rimouski.

Les aires marines créées un peu partout au cours des dernières décennies ont eu un effet important sur les efforts de reconstitution de diverses populations de poissons, ajoute Mme Morissette.

Espadon qui sort de l'eau. On recense 1900 tonnes d’espadon pêché au Canada l’année dernière. (Photo d’archives) Photo : X/Pêches et Océans Canada

Sharon Arnold, responsable des programmes marins au Ecology action centre d’Halifax, partage son avis. Puisque le Canada atlantique partage de nombreuses populations de poissons avec les États de l’est, notamment le thon rouge, le thon jaune, l’espadon et le maquereau, les décisions américaines relatives à la pêche auront un effet au Canada.

Il y a beaucoup de populations qui migrent le long de la côte pendant l’année […] Donc ce qui arrive à ces populations de poissons aux États-Unis va avoir un impact sur notre capacité de les attraper de manière durable au Canada, explique Mme Arnold.

Les écosystèmes sont liés à l’économie

Lyne Morissette est d’accord pour dire que l’enjeu économique est directement lié à celui de la protection des écosystèmes.

Ça améliore les stocks et ce qu’on peut pêcher autour […] Quand on parle de protéger des écosystèmes, ce n’est pas juste protéger nos amis les animaux, c’est pour protéger aussi des communautés côtières qui dépendent d’une pêcherie qui doit bien être gérée. C’est inquiétant pour nous comme pour l’ensemble des pêcheries de l’Atlantique Nord, je dirais.

Si davantage de produits de la pêche se retrouvent soudainement sur le marché américain, le prix que reçoivent les pêcheurs canadiens pour leurs prises pourrait, à terme, diminuer, ajoute Lyne Morissette.

Ça va probablement faire chuter les prix où le Canada vend son homard, son crabe, toutes ces espèces que l’on exporte parce qu’on exporte beaucoup de poissons et de fruits de mer aux États-Unis. Donc, c’est sûr que ça va exacerber la concurrence et que ça va affecter la pêcherie d’un point de vue économique, prédit-elle.

Gilles Thériault.Gilles Thériault, le directeur général de l’Association des transformateurs de crabe du Nouveau-Brunswick. (Photo d’archives) Photo : Radio-Canada / Frédéric Cammarano

Les transformateurs pourraient, à court terme, bénéficier du fait que les homardiers américains pêchent plus de homard, selon le directeur général de l’Association des transformateurs de crabe du Nouveau-Brunswick (ATCNB) Gilles Thériault. Cette association compte plusieurs transformateurs de homard parmi ses membres.

On sait qu’il y a beaucoup de homard qui part des États-Unis et qui vient au Canada pour être transformé et qui repart ensuite. Ce n’est certainement pas quelque chose qui plaît à Trump […] Mais il y a une raison pour ça. Ici, dans le sud-est du Nouveau-Brunswick, ça fait des générations et des générations que l’on fait ça, alors on est très efficaces […] Ça leur coûte plus cher de transformer chez eux, analyse Gilles Thériault.

Un homard aux pinces attachées par des élastiques est tenu par le travailleur d'une usine.Beaucoup de homard capturé aux États-Unis est transformé au Canada, rappelle l’Association des transformateurs de crabe du Nouveau-Brunswick. (Photo d’archives) Photo : CBC / Robert Short

Il estime toutefois que, à moyen terme, le gouvernement américain pourrait vouloir trouver des manières de transformer ses fruits de mer en sol américain ou imposer des tarifs aux crustacés transformés en territoire canadien.

Les questions de la biodiversité marine et de la santé des stocks de homard préoccupent tout autant Gilles Thériault.

Quelles vont être les conséquences sur l’écosystème et la biodiversité si on est pas réglementé? Si on a des réglementations, ce n’est pas pour rien, dit-il.

LA UNE : L’aire de distribution de plusieurs espèces de poisson, notamment celle du Maquereau bleu de l’Atlantique Nord-Ouest, se situe dans les eaux de la côte est du Canada et des États-Unis. Photo : Radio-Canada / Carine Monat

PAR vec les informations de Katherina Boucher