Des scientifiques du ministère des Pêches et des Océans du Canada (MPO) font désormais des prévisions sur l’avenir des stocks de poissons dans la région de l’Atlantique en se basant sur les conditions environnementales.
La nouvelle méthode a servi pour la première fois cette année dans le cas du hareng de printemps, dans le sud du golfe du Saint-Laurent, qui est en difficulté depuis une vingtaine d’années.
Une analyse de l’impact des changements dans l’écosystème et un nouveau modèle donnant peu de chances au rétablissement de l’espèce ont contribué à la décision du ministère d’imposer un moratoire sur la pêche au hareng de printemps.
Le stock distinct de hareng d’automne, dans la même région, se porte mieux. Le quota a simplement été réduit de 17 % la semaine dernière.
Les changements de conditions coïncident avec le déclin des stocks
L’approche basée sur les conditions environnementales améliore la compréhension des scientifiques sur ce qui survient aux stocks. Elle les aide aussi à gérer les attentes sur un possible rétablissement, selon un biologiste du MPO à Moncton, François Turcotte.
Dans une étude publiée récemment, il a lié des changements environnementaux dans le golfe du Saint-Laurent à l’écroulement du stock de harengs du printemps. Il précise que les eaux ont commencé à se réchauffer en 1992 et que moins de harengs vivent plus de deux ans. Le MPO définit cette étape de leur vie comme étant le recrutement
.
La hausse de la température des eaux et la baisse du taux de survie des jeunes harengs coïncident aussi avec des changements du côté du zooplancton, un animal marin microscopique dont se nourrissent les harengs et qui est essentiel à leur survie.
Le volume du zooplancton très nutritif qui aime les eaux fraîches a diminué, tandis que le volume du zooplancton moins nutritif qui aime les eaux chaudes a augmenté.
Le niveau moyen de recrutement du hareng de printemps a diminué à la moitié de ce qu’il était
, souligne François Turcotte. Ces dernières années, le niveau est 10 fois inférieur au recrutement le plus élevé observé avant 1992.
Prévoir combien de harengs vivront deux ans
François Turcotte a élaboré un modèle qui tient compte de la présence du zooplancton afin d’estimer combien de harengs pourraient survivre jusqu’à l’âge de deux ans.
Le modèle a fait ses preuves. Il a donné des prévisions suffisamment précises des événements des dernières années pour qu’il serve dans le cadre de futures évaluations des stocks, selon le spécialiste.
Le hareng, explique-t-il, joue un rôle clé dans l’écosystème du golfe. Il sert de nourriture à beaucoup d’autres espèces dans la chaîne alimentaire. Il importe donc de comprendre ce qui influe sur ce stock et ce qui l’empêche de se rétablir.
Un autre scientifique, Sebastian Pardo, du Centre d’action écologique à Halifax, estime qu’il est censé tenir compte désormais des conditions environnementales en matière de gestion des pêches.
François Turcotte ajoute que l’approche employée pour faire cette étude fait partie d’une initiative nationale du MPO et qu’elle est un moyen d’inclure les changements climatiques à la gestion des stocks de poissons.
D’après un reportage de Paul Withers, de CBC
LA UNE : Le volume de harengs qui naissent au printemps dans le golfe du Saint-Laurent diminue depuis le début des années 1990. PHOTO : MINISTÈRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS DU CANADA