Le Golfe du Saint-Laurent perd sa glace

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Le volume de glace enregistré dans le golfe du Saint-Laurent n’a jamais été aussi faible à cette période de l’année depuis le début des mesures en 1969. Ce triste record, qui menace la biodiversité, mais aussi les côtes de l’Île-du-Prince-Édouard, préfigure des hivers sans glace d’ici 100 ans.

L’absence est spectaculaire. Autour de l’Île-du-Prince-Édouard, il n’y a aucune trace de glace à l’horizon. Selon les dernières estimations disponibles, le volume de glace recouvrant le Golfe du Saint-Laurent est d’à peine 1 km3.

Autrement dit, seuls 2 % du Golfe sont glacés. Il s’agit d’un «minimum historique», révèle Peter Galbraith, chercheur en océanographie physique pour Pêches et Océans Canada.

Peter Galbraith
Peter Galbraith est chercheur en océanographie physique pour Pêches et Océans Canada. (Photo : Gracieuseté)

On parle de la surface la plus réduite jamais enregistrée pour la saison depuis 1969, début de la surveillance. Au cours d’un hiver classique, le volume devrait être de 62 km3 à cette époque de l’année. «Et la glace que l’on a en ce moment est extrêmement mince», précise Peter Galbraith.
L’effondrement inédit s’explique par des températures de l’air anormalement élevées. En décembre, la température moyenne relevée à l’aéroport de Charlottetown était supérieure de 3 °C à la normale. Jusqu’à présent en janvier, elle est de 6,1 °C au-dessus des normales.

Réchauffement climatique en cause
Peter Galbraith explique que dans le golfe du Saint-Laurent la hausse des températures est quasiment deux fois plus rapide en hiver qu’en été. Les températures ont augmenté de 2,3 °C durant la saison hivernale au cours des cent dernières années, contre 1,2 °C pendant la période estivale.
Sur les quatorze dernières années, les scientifiques comptent quatre hivers sans glace ou presque : en 2010, 2011, 2021, et maintenant en 2023. Avant cela, il fallait remonter à 1958 pour trouver un Golfe libre de glace. «Ça arrive clairement de plus en plus souvent», constate Peter Galbraith.
D’après les mesures de Pêches et Océans Canada, ces hivers sans glace sont des hivers où la température de l’air est plus chaude de 2,5 degrés par rapport à la moyenne climatologique de 1991-2020. «Avec le réchauffement climatique, ça devrait devenir la norme dans 100 ans. Il n’y aura plus de glace, sauf exception», prévient Peter Galbraith.

Cette disparition annoncée menace non seulement les populations de phoques du Golfe, dont les femelles mettent bas sur la glace, mais aussi les côtes de l’Î.-P.-É. directement exposées aux tempêtes et aux vagues, le rivage va davantage s’éroder.

Crabe des neiges en danger
Peter Galbraith s’inquiète, lui, pour l’avenir de certaines espèces comme le crabe des neiges. Ce crustacé a élu domicile dans la couche d’eau intermédiaire du Golfe. En principe, cette couche emprisonne le froid de l’hiver jusqu’à l’été.

«Mais en l’absence de glace, elle n’a jamais refroidi cette année. Ce n’est pas bon pour les crabes, incapables de survivre dans de l’eau trop chaude», relève le chercheur.

À quelques semaines du début du printemps, Peter Galbraith a peu d’espoir de voir de la glace se former : «Un coup de froid ne suffira pas à rattraper le retard, la température de l’eau est encore bien trop chaude.» Selon les relevés de Pêches et Océans Canada, à certains endroits du Golfe, l’eau est encore à deux degrés au-dessus du point de congélation.

LA UNE : La baie autour de Charlottetown est libre de glace alors qu’elle devrait être complètement gelée à cette époque de l’année. (Photo : Marine Ernoult)
PAR Marine Ernoult