Catheryne, 24 ans de novice à matelot en une traversée

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Les Grandes Voiles du Havre, ce sont de beaux bateaux, mais aussi 1 200 membres d’équipages. Catheryne Langford fait partie de ces matelots. En cinq mois, cette novice a traversé deux fois l’Atlantique à bord du Blue Clipper, un trois-mâts de 43 m, de Londres jusqu’au Havre. Cette Québécoise ne compte pas revenir à terre de sitôt.

Ses cheveux d’or sont noués comme un noeud marin. Elle a pris l’habitude des sollicitations. Et ce jour-là, elle déboule avec un large sourire et son pull trop grand, invitée dans une conférence de commandants de navire pour raconter son histoire. Sur l’avant-scène elle se tient droite, pleine d’enthousiasme, les pieds plantés au sol comme un sextant sur une carte. Elle qui, depuis un an, ne jure plus que par la mer.

À 24 ans, Catheryne Langford fait la fierté des Îles de la Madeleine, archipel de 10 000 habitants du golfe du Saint-Laurent. La jeune Québécoise vient de terminer la Rendez-vous 2017 Tall Ships Regatta, une course de quatre mois et demi à travers l’Atlantique. Partis de Londres en avril, une vingtaine de trois-mâts, dont le Belem, sont allés jusqu’au Portugal avant de rejoindre les Bermudes, Boston aux États-Unis, Halifax au Canada, et de revenir au Havre.

La partie n’était pas gagnée pour Catheryne. En septembre 2016, la pétillante étudiante acadienne rejoignait les bancs de la faculté pour démarrer une année de maîtrise, en gestion du développement international et de l’humanitaire, à l’Université de Laval à côté de Montréal.

Un jour, elle entend parler de cette régate transatlantique sur laquelle embarquent chaque année 6 000 jeunes matelots à la recherche d’une aventure humaine fantastique. « Mon grand-père était pêcheur. J’ai toujours su que la voile était faite pour moi. Mon problème était que je n’avais jamais mis les pieds sur un voilier et que je n’avais pas les 12 000 dollars (10 100 €) en poche pour embarquer. »

Pas de quoi décourager ce tempérament bien trempé. Pour récolter cette somme, Catheryne frappe à toutes les portes. Travaille un « plan d’affaires ». Son but ? Devenir l’ambassadrice des Îles de la Madeleine, d’où elle est originaire, pour faire rayonner ce petit confetti à la nature généreuse mais en déficit de notoriété. Elle convainc une quarantaine d’entreprises et d’institutions locales de l’aider, lance une levée de fonds sur une plateforme de financement participatif. « Quand tu parles avec le coeur, tu réussis à transmettre ta passion, insiste-t-elle de son regard cristallin. C’est peut-être ce qui a fonctionné. »

« C’était juste magique »

Le 13 avril, elle prend le départ de la course à Greenwich à bord du Blue Clipper, une goélette de 43 m construite en Suède en 1991. Avant d’être un navire école, c’était un yacht privé qui appartenait à l’entreprise Hennessy. Cette compagnie transportait du cognac jusqu’à Shanghaï au XIXe siècle. Sa coque blanche est reconnaissable entre toutes par son élégante poupe de yacht et sa longue quille de ballast.

Vingt-quatre matelots anglais, portugais, croates, québécois… se relaient de jour comme de nuit sur le pont, par quart, et sous la responsabilité du capitaine anglais Chris Rose. En guise de récompense, des souvenirs de lever et de coucher de soleil inoubliables. « Celui qui m’a le plus marqué, c’était une nuit au large du Portugal. Nous étions cinq sur le pont, et c’est moi qui conduisais le bateau. Il y avait une atmosphère incroyable, aucun bruit, pas de moteur, juste les voiles, et les étoiles pour nous éclairer. On a un sentiment de grande liberté. »

Au départ, Catheryne a dû faire ses preuves. « J’ai commencé comme apprentie matelot sur le bateau, à recevoir les bases comme hisser les voiles, monter sur le mât de misaine. Au départ, le plus difficile, c’est la barrière de la langue. Mais avec des mimes et un peu de pratique, on arrive vite à se faire comprendre. »

Les paysages défilent sous ses yeux. « Tout était nouveau pour moi, je traversais l’Atlantique, c’était juste magique. » Au fil des jours, Catheryne trouve sa place. Elle devient cuisinière pour l’équipage et régale ses nouveaux compagnons de route avec ses vol-au-vent, caviars de homard, et crabes des neiges. Avec une arme secrète en plus : le gâteau au chocolat et pois chiche ! Arrivée à Boston, elle doit changer de bateau. Là voici à bord de l’Atyla, un navire école espagnol de 31 m, avec un nouvel équipage. Mais c’est pour la bonne cause. Le navire fait une escale chez elle, aux Îles de la Madeleine. C’est en tenue de pirate qu’elle choisit de retrouver famille et amis qui l’accueillent en héroïne.

Le parcours, l’énergie et la bonne humeur de Catheryne ont donné des idées à un équipementier de vêtements de sport de voile qui la veut comme ambassadrice au Québec. La jeune stagiaire a des envies d’Arctique et n’envisage pas de poser ses valises.

 

Un article original de Ouest France
LA UNE : Catheryne Langford n’a désormais plus l’intention de s’attarder à terre trop longtemps. © Hélène Lompech