La perte de son bateau à quelques heures du début de la pêche au homard aurait pu être catastrophique pour le pêcheur Normand Deraspe, mais c’était sans compter sur la mobilisation des pêcheurs madelinots.
Vendredi, veille de la mise à l’eau des premiers casiers de l’année, était la journée des derniers préparatifs sur le quai de Grande-Entrée, d’où part le tiers de la flottille de homardiers des Îles.
Normand Deraspe était prêt depuis déjà deux jours. C’était la fin de journée. «J’avais fait mes vérifications; voir s’il n’y avait pas d’eau, si le bateau partait bien, ce que je fais habituellement », raconte M. Deraspe.
Tout était en ordre. Le reste est arrivé très vite.
Le téléphone a sonné juste un peu après 19 h. Le bateau, toujours à quai, était en train de sombrer. «Quand je suis arrivé, relate le pêcheur, je suis entré dans le bateau. Il y avait de l’eau jusque dans la cabine. Je suis sorti. Je ne voulais pas être à bord si ça coule.»
Rapidement les pêcheurs toujours sur place se sont mobilisés. «Il était déjà pas mal tard, mais on s’est mis là une gang de pêcheurs, on devait être au final au-dessus de cinquante, certain! On a monté le bateau, on l’a traîné jusqu’en haut, au hangar à bateau» , explique Normand Deraspe.
Pas question de prendre la mer le lendemain. Il y a des épreuves des fois qui te semblent insurmontables , commente avec le recul le pêcheur madelinot.
La soirée et la nuit vont lui apprendre que non.
«Il était rendu minuit, une heure du matin, dit-il, mais tout le monde partait pour aller à la pêche le lendemain matin à trois heures, quatre heures. Tout le monde est resté. Ils m’ont tous donné un coup de main pour sortir les cages du bateau, amener le bateau à la shop, démêler les cordages. Je suis arrivé le lendemain, tout était prêt, démêlé, tout était fait si je voulais aller mettre mes cages à l’eau.»
Un bateau de remplacement
Pour sa première sortie, Normand Deraspe a pu emprunter le bateau d’amis qui pêchent dans le secteur d’Anticosti.
Toutes les 273 cages ont pu être mises à l’eau comme prévu.
Le pêcheur devra par contre louer un autre bateau pour aller à la pêche au cours des prochaines semaines. Le problème devrait aussi se résoudre très rapidement. «Je suis arrivé de la journée de pêche hier et le bateau était déjà prêt à 75 %. Le bateau n’était même pas à l’eau, il a fallu le remettre à l’eau. Mettre ça prêt. Un bateau, ça prend du temps, j’ai travaillé moi-même un mois avant de mettre mon bateau à l’eau» , souligne M. Deraspe.
Les dommages causés à son bateau n’ont pas encore été évalués, mais les dégâts sont majeurs, pense Normand Deraspe. Les raisons de l’incident demeurent inconnues.« L’assurance n’a pas passé encore, mais c’est plus qu’un petit tuyau cassé. À sept heures, il ne coulait pas. À sept heures et demie, il était presque coulé, à huit heures il était dans le fond. Il est entré de l’eau en quantités phénoménales.»
Le pêcheur examine quelques hypothèses. Une d’entre elles est que le bateau ait accroché le quai à la faveur d’une marée très basse. «Il y a de grosses chances qu’il soit resté pris sous le quai puis la marée à continuer à monter. Quand ç’a pogné les égouttoirs du bateau sur le pont, l’eau s’est mise à entrer et on s’entend, quand le bateau est chargé, les égouttoirs ne sont pas à deux pieds de l’eau, mais à trois ou quatre pouces.»
Cette hypothèse reste à vérifier. En attendant, le pêcheur remercie tous ceux qui l’ont soutenu et se dit choyé de vivre sur son île avec des gens merveilleux.
Une campagne de financement pour aider Normand Deraspe, qui entamait sa 25e saison de pêche, a été lancée aux Îles sur le site Gofundme afin de l’aider à réparer son bateau, le Simon-Julie.
LA UNE : Le bateau a pu être sorti de l’eau en soirée grâce à la mobilisation d’une cinquantaine de pêcheurs et d’aides-pêcheurs. PHOTO : NORMAND DERASPE