Après 6 mois de blocage par Meta, l’information locale semble moins atteindre les Acadiens

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Six mois après la décision de Meta de bloquer la diffusion des nouvelles sur ses plateformes numériques comme Facebook et Instagram, les impacts se font sentir dans la communauté et les médias acadiens. Certains trouvent la transition difficile, alors que d’autres estiment avoir évité le pire.

Une incidence majeure au Moniteur acadien

Jason Ouellette, directeur général de l’hebdomadaire Le Moniteur acadien et de Radio Beauséjour, dans le sud-est du Nouveau-Brunswick, indique que le blocage de Meta a eu une incidence majeure sur la fréquentation de ses plateformes numériques par les lecteurs.

Des pages du Moniteur acadien.

Le « Moniteur acadien » a vu la fréquentation de son site web dégringoler depuis six mois. PHOTO : RADIO-CANADA

Avant, avec Meta, on était à 25 000 visites par mois sur le site du Moniteur acadien. Depuis le blocage, nous sommes descendus à 2500. Ce que Meta a fait va à l’encontre de notre mission communautaire. Ça nous met des bâtons dans les roues, commente-t-il, en soulignant que la plateforme Facebook est très populaire en Acadie chez les 35 ans et plus.

Ce que fait Meta brime la démocratie et le droit à la liberté d’expression, selon le directeur général du Moniteur acadien.

Un homme pose devant la caméra.

Jason Ouellette, directeur général de l’hebdomadaire « Le Moniteur acadien » et de Radio Beauséjour. PHOTO : GRACIEUSETÉ : JASON OUELLETTE

Mais ce qui l’inquiète le plus, c’est la réaction passive du public.

Le peuple semble inactif et indifférent devant ce qui se passe. Il ne réalise pas l’impact à long terme de cette décision de Meta sur les communautés acadiennes.

Une citation de Jason Ouellette, directeur général de l’hebdomadaire Le Moniteur acadien et Radio Beauséjour

Des effets ressentis à L’ Acadie Nouvelle

L’Acadie Nouvelle aussi a senti l’incidence de la décision de Meta. L’éditeur du quotidien francophone, Francis Sonier, explique que son journal a dû faire preuve de proactivité.

On a eu une baisse en août, quand le blocage a commencé, avant de voir une reprise grâce à des promotions sur différentes plateformes afin d’y rejoindre les gens autrement. Nous avons atténué l’impact et on s’en est bien tiré. Mais j’ai pu parler à quelques collègues des autres médias où c’est plus désastreux, poursuit-il.

Le site web de l'Acadie Nouvelle sur un téléphone intelligent.

« L’Acadie Nouvelle » a réussi à atténuer l’effet du blocage des nouvelles par Meta. PHOTO : RADIO-CANADA / PATRICK LACELLE

Il avoue qu’il ne tiendrait probablement pas le même discours si Google avait mis sa menace à exécution de bloquer les nouvelles, en décembre, parce que plus de gens consultent Google.

Pire en situation minoritaire, selon Radio-Canada

Du côté de Radio-Canada, le porte-parole Leon Mar déplore que les internautes au Canada ne voient plus sur leur fil d’actualité que des sources d’information non vérifiées. Il affirme que ce problème est particulièrement important pour les communautés francophones en situation minoritaire et pour les personnes vivant en milieu rural, qui dépendent davantage de Facebook pour s’informer.

Une image du logo de Meta

Depuis août, Meta a bloqué la diffusion de nouvelles sur ses plateformes numériques telles Facebook et Instagram. PHOTO : LA PRESSE CANADIENNE

La décision de Meta de bloquer l’accès des Canadiens et des Canadiennes à des sources locales d’information vérifiée et digne de confiance est irresponsable et constitue un abus de sa position dominante dans le marché. C’est d’autant plus vrai à un moment où la population en a besoin pour rester à l’abri des événements météorologiques sans précédent au pays, a-t-il indiqué.

Des craintes dans la communauté

Pauline Robichaud, de Caraquet, lisait beaucoup les nouvelles sur Facebook avant le blocage de Meta. Aujourd’hui, elle s’en remet aux médias traditionnels, comme la télévision, pour trouver les informations qui l’intéresse.

Elle croit que Meta a ouvert toute grande la porte au discours complotiste, dans lequel les explications simplistes envahissent l’espace public.

On écoute beaucoup de nouvelles à la télé, mais sur le web? Nos enfants qui travaillent et qui n’ont que peu de temps pour s’informer doivent faire plus de recherches pour avoir la bonne information. Nous, les plus vieux, on reste avec la télé, mais les jeunes? Ils doutent de tout, et ça divise l’opinion publique, comme aux États-Unis, pense-t-elle.

Une personne manipule un téléphone intelligent.

La consultation de l’information sur les médias sociaux a changé depuis la décision de Meta de bloquer les nouvelles sur Facebook et Instagram. PHOTO : RADIO-CANADA / RÉAL FRADETTE

Marie-Paule Gilardeau, de Saint-Simon dans la Péninsule acadienne, consultait souvent des nouvelles sur Facebook. Elle les partageait si elle pensait que ça pouvait intéresser d’autres personnes.

Maintenant, je ne le peux plus et c’est dommage. L’information se doit d’être communiquée au plus de gens possible, car l’ignorance est une plaie sociale, croit-elle.

Mathieu Durepos, de Dundee dans le Restigouche, a aussi changé la manière dont il prend connaissance des nouvelles.

C’est plus difficile, concède cet amateur de sports. Avant, je consommais beaucoup de mes nouvelles sur Facebook. Maintenant, je regarde les sites de Radio-Canada, de l’Acadie Nouvelle, de RDS et TSN pour avoir les grandes lignes.

Dix fois moins de circulation

Selon la professeure au programme d’information-communication de l’Université de Moncton, Marie-Linda Lord, il se fait jusqu’à 10 fois moins de circulation d’information sur les réseaux sociaux qu’avant le blocage de Meta.

Marie-Linda Lord debout dans un bureau.

Pour Marie-Linda Lord, professeure titulaire en information-communication à l’Université de Moncton, le blocage de la diffusion des nouvelles par Meta a eu un impact important sur les médias traditionnels. PHOTO : RADIO-CANADA

Une étude du Centre des médias de l’Université Laval à Québec mentionne que des gens sont retournés à la source depuis le blocage de Meta. Mais ça demeure un petit pourcentage et ça concerne surtout les médias gratuits, dont Radio-Canada, TVA ou encore La Presse. Quand les gens ont accès à du contenu gratuit, ils sont moins disposés à payer pour de l’information, soutient-elle.

La décision de Meta force les médias traditionnels à revoir leur modèle d’information, poursuit-elle.

dernières années ne peut plus fonctionner","text":"Le modèle des 50dernières années ne peut plus fonctionner"}}">Le modèle des 50 dernières années ne peut plus fonctionner, estime Marie-Linda Lord. Des gens l’ont compris et ça force à faire les choses autrement. L’Acadie Nouvelle a été très dynamique et ne s’est pas assise sur ses lauriers.

L’intelligence artificielle à surveiller

Marie-Linda Lord mentionne que Facebook a considérablement réduit la confiance des utilisateurs envers le contenu des médias sociaux et traditionnels, alors qu’un nouvel ennemi pointe à l’horizon : l’intelligence artificielle.

C’est un nouvel ennemi en plein essor au cours d’une année importante, alors que la moitié des électeurs dans le monde seront appelés aux urnes, soutient la professeure de l’Université de Moncton.

L’arrivée de l’intelligence artificielle inquiète. Tout a tellement l’air authentique. C’est là où les médias traditionnels ont un rôle important à jouer pour combattre la désinformation et les astuces qui vont circuler sur les réseaux sociaux. Le journalisme devra rétablir la confiance avec le public avec des informations fiables, un travail rigoureux et factuel, indique-t-elle.

LA UNE : Cela fait maintenant six mois que Meta a bloqué l’accès aux nouvelles canadiennes sur ses plateformes numériques, dont Facebook. PHOTO : REUTERS / DADO RUVIC

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