Golfe du Saint-Laurent : « Presque tous les indicateurs sont au rouge »

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La tendance au réchauffement des eaux de l’estuaire et du golfe du Saint-Laurent s’est poursuivie en 2023, selon des scientifiques de Pêches et Océans Canada.

Presque tous les indicateurs sont à peu près dans le rouge, explique Peter Galbraith, chercheur en océanographie physique à Pêches et Océans Canada.

Des scientifiques de l’Institut Maurice-Lamontagne, à Mont-Joli, ont présenté mardi un bilan de l’état de l’estuaire et du golfe du Saint-Laurent en 2023.

On est à des températures presque records en profondeur. Dans les dernières années, on a eu des eaux chaudes les plus chaudes qu’on a jamais vécues. On a de l’oxygène dissous qui est à des valeurs les plus basses et des acidités les plus hautes jamais enregistrées, explique Peter Galbraith.

Dans le golfe, les eaux de surface ont connu une hausse record de températures de 2,5° C en juillet et de 2,8° C en octobre dernier par rapport à la moyenne des quarante dernières années. Ces augmentations s’expliquent par des vagues de chaleur marines, selon le chercheur.

L’estuaire du Saint-Laurent a aussi connu un automne exceptionnellement chaud.

En septembre et en octobre, les températures de surface y étaient supérieures d’environ 5° C, un autre record.

Peter Galbraith devant un podium.

Peter Galbraith, chercheur en océanographie physique à Pêches et Océans Canada PHOTO : RADIO-CANADA / FRANCOIS GAGNON

Que ce soient les eaux de surface, la couche intermédiaire froide ou les eaux profondes, il y a une tendance au réchauffement, selon Peter Galbraith.

Par ailleurs, 2024 est l’année avec le moins de couvert de glace depuis que les données sont compilées.

De notre vécu, le Saint-Laurent n’a jamais été aussi sollicité en termes de pression sur les ressources

Une citation de Peter Galbraith, chercheur en océanographie physique à Pêches et Océans Canada

Des perdants et des gagnants

De tels changements augurent mal pour les espèces de poissons et de crustacés d’eau froide, comme le crabe des neiges, le flétan du Groenland ou encore la crevette nordique, dont l’habitat dépend des eaux très froides.

Ces espèces vont vraisemblablement atteindre un niveau d’extinction commerciale, selon Marie-Julie Roux, chercheuse à l’Institut Maurice-Lamontagne.

Un thon rouge.

Le thon rouge fait partie des espèces marines qui profitent du réchauffement des eaux, tout comme le homard, le calmar ou le flétan de l’Atlantique. (Photo d’archives) PHOTO : ASSOCIATED PRESS / CHRIS PARK

Cela veut dire que de telles espèces seront encore présentes dans le golfe, mais à des niveaux insuffisants pour permettre une pêche commerciale.

Ce qui est plus probable pour l’instant comme scénario, c’est que les espèces [qui vivent en] eau froide vont se maintenir dans le système, mais à des taux d’abondance beaucoup plus faibles que ce qu’on a connu dans les 30 dernières années, explique la chercheuse.

D’autres espèces, comme le homard, le calmar ou encore le flétan de l’Atlantique, profitent déjà du réchauffement des eaux, selon Hugues Benoît, chercheur scientifique à Pêches et Océans Canada.

Je pense qu’il y a des pêcheurs de homard de la Côte-Nord qui sont très heureux. C’est une espèce qu’ils ne voyaient pas avant. Si je suis un thon rouge, je suis très heureux de rentrer dans le golfe; les conditions sont très favorables, illustre-t-il.

Selon les chercheurs, il s’agit d’une période de transition pour l’écosystème du Saint-Laurent en raison des changements climatiques et d’un défi d’adaptation pour l’industrie des pêches.

Ce qui est peut-être le plus difficile d’un point de vue d’impact sur les pêches, c’est que la vitesse à laquelle les changements se produisent est beaucoup plus élevée que ce qu’on a vu avant, explique Marie-Julie Roux.

Des scientifiques planchent d’ailleurs sur un modèle pour mieux évaluer les impacts de l’acidification du Saint-Laurent sur différentes espèces du Saint-Laurent.

LA UNE : Les eaux de surface de l’estuaire et du golfe du Saint-Laurent ont battu des records en 2023, selon Pêches et Océans Canada. (Photo d’archives) PHOTO : RADIO-CANADA

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