Les enrochements à titre privé, est-ce permis?

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C’est dans les années 1990 que nous avons vu apparaître progressivement sur nos côtes des enrochements servant à protéger des propriétés privées. Ces travaux étaient généralement faits sur le coup de la panique au lendemain d’une tempête destructrice qui mettait en danger imminent les biens des citoyens concernés. C’était généralement fait à la hâte sans autorisation et surtout sans que l’expertise professionnelle en génie civil soit mise à profit. C’était comme cela ici tout comme dans le reste du Québec côtier. Il suffit de faire le tour de la péninsule gaspésienne pour le constater. Aux Îles, les premiers permis municipaux qui ont été délivrés à cet égard l’ont été en conformité avec les règlements de zonage des anciennes municipalités locales entrés en vigueur en 1995.

Il faut savoir qu’à l’époque la réglementation concernant le milieu riverain était assez sommaire. En effet, il n’y avait qu’une seule disposition au règlement de zonage interdisant tous travaux dans une bande dite riveraine, laquelle était d’une largeur de 10 ou 15 mètres mesurée à partir de la ligne des hautes eaux. Il faut aussi savoir que la notion de ligne des hautes eaux connue et utilisée par les arpenteurs-géomètres était celle des plus hautes marées du mois de mars ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.

Ce n’est qu’en 2004, avec l’entrée en vigueur du premier règlement de contrôle intérimaire de la récente Municipalité des Îles (RCI 2004-06) que ce type d’ouvrage devenait mieux encadré. En effet, c’est à ce moment que le conseil a inclus à la réglementation municipale la Politique provinciale de protection des rives du littoral et des milieux humides qui venait changer complètement l’approche en regard de ces milieux naturels. Par ailleurs, une réglementation d’urbanisme ne peut être rétroactive et, par conséquent, tous les travaux réalisés avant 2004 devenaient, par effet de la Loi, protégés par le principe reconnu des droits acquis. C’est d’ailleurs sur la base de ce principe que les gens sont autorisés à entretenir et à réparer leur ouvrage à condition que ces travaux fassent l’objet d’une demande de permis auprès de l’inspecteur municipal.

Maintenant, si à l’époque où ces travaux ont été effectués on observait généralement, tant sur le cadastre que sur le terrain, de bonnes distances entre l’ouvrage de protection et la mer, celles-ci se sont graduellement rétrécies au fil des années sous l’effet des vagues, du ressac qu’elles entraînent et du rehaussement du niveau de la mer. Le phénomène est connu et largement documenté et malheureusement, à plusieurs endroits, on constate clairement une disparition de la plage devant ce type d’ouvrage. C’est exactement ce qu’on observe sur la plage du Bassin où, en fonction des saisons et de la marée, il est parfois difficile d’accéder à la plage située du côté ouest, sinon que par l’extrémité du chemin qui dessert les chalets du même côté.

Est-ce que ce type de projet d’enrochement ou de construction en bordure de la côte serait possible aujourd’hui?

La réponse est non. En 2016, les municipalités côtières ont intégré à leurs schémas d’aménagement et à leurs règlements d’urbanisme le cadre normatif sur l’érosion élaboré par le gouvernement du Québec qui interdit les enrochements de même qu’une nouvelle construction dans une bande considérée comme non constructible. Cette réglementation est claire, laisse peu de place à l’interprétation et surtout est bien adaptée à nos réalités insulaires et géomorphologiques. Ainsi, depuis 2016, ce nouveau cadre réglementaire est appliqué avec rigueur, au grand désarroi de ceux qui souhaiteraient protéger leurs biens et à qui l’on refuse l’émission de permis. Ces interdictions peuvent être levées, mais les conditions sont strictes et elles exigent des études sérieuses préparées par des professionnels qui doivent démontrer des connaissances en génie côtier. Donc, quand on voit aujourd’hui des bâtiments implantés dans des secteurs vulnérables à l’érosion ou à la submersion côtière, c’est qu’ils ont été construits avant 2016 ou qu’ils respectent les règles en s’implantant tout juste de l’autre côté de la ligne d’interdiction, mais quand même près du rivage.

 

LA UNE :Plage du Bassin sur L’Île-du-Havre-Aubert
Source : Municipalité des Îles-de-la-Madeleine