Des tests PCR pour contrer les espèces envahissantes

Publicité

Articles similaires

Les équipements de Total Océan resteront dans l’archipel

Le Centre collégial de transfert technologique (CCTT) de Saint-Félicien,...

Le CISSS des Îles n’abandonne pas son projet de logements

Le Centre intégré de santé et de services sociaux...

L’ancien porte-parole de la SQ Claude Doiron subira un procès

L’enquête préliminaire de l’ancien porte-parole de la Sûreté du...

Pêche à l’appât du maquereau : « On est oubliés », disent les pélagiques

Après l’annonce par Pêches et Océans Canada de la réouverture...

Les 35 ans d’Attention FragÎles

L'organisme Attention FragÎles, désormais reconnu comme conseil régional de...
Les tests PCR ne servent pas seulement à détecter le virus de la COVID-19. Depuis 2019, les biologistes de Pêches et Océans Canada les utilisent pour déceler les espèces envahissantes.

 

Les tests d’acide désoxyribonucléique (ADN) permettent une détection rapide avant une présence endémique, au moment où il est encore possible d’agir.

C’est effectivement la même technologie que celle des tests effectués pour dépister le virus de la COVID-19, confirme Nathalie Simard, biologiste à l’Institut Maurice-Lamontagne et responsable du dossier des espèces aquatiques envahissantes.

C’est un outil très efficace et très sensible, souligne la biologiste. Il permet de repérer une très faible présence avant l’infestation.

Cette technique peut être employée partout et est appelée à se généraliser. Étant donné qu’on a un grand territoire, ça nous permet de choisir les endroits où on va aller chercher plus en profondeur une espèce en particulier, explique la biologiste.

Pour le moment, toutefois, c’est seulement dans l’archipel madelinot que les tests test d’amplification en chaîne par polymérase (PCR) sont utilisés. La raison en est fort simple : c’est le secteur maritime du Québec qui compte le plus grand nombre d’espèces envahissantes, soit sept espèces.

L’équipe de Nathalie Simard y a eu recours pour la première fois en 2019 afin de vérifier la présence du crabe vert. Cette espèce est présente depuis bon nombre d’années (2010-2012), dans les marais et sur les côtes rocheuses de l’archipel.

La population a chuté autour de 2015-2016 à la suite d’une pêche intensive et de plusieurs hivers plus froids. Difficile de déterminer la cause de la chute de la population, note la biologiste, mais l’outil est désormais utilisé pour en suivre l’évolution. Au cas où la population se mettrait à augmenter de façon importante, pour qu’on ait un signal avec l’ADN pour dire : « OK, il se passe quelque chose, et il faut retourner faire de la pêche intensive pour contrôler la population ».

 Screen Shot 2022-01-10 at 10.33.41 AM

La méthode permet d’épargner du temps et des efforts. Aller chercher deux litres d’eau et les filtrer, c’est rapide.

Intervention rapide

Récemment, les biologistes ont aussi effectué des tests d’acide désoxyribonucléiqueADN pour contrôler la présence de l’ascidie jaune aux Îles-de-la-Madeleine, un tunicier qui filtre le plancton et entre ainsi en concurrence avec des mollusques comme les moules et les huîtres. C’est un problème qui peut causer bien des dommages à l’industrie des moules, souligne Nathalie Simard.

Les tests ont révélé la présence de l’ascidie à la marina de Havre-aux-Maisons l’été dernier.

Une équipe de plongeurs a pu confirmer la présence de l’envahisseur en faible abondance. Un nettoyage a aussitôt été entrepris afin d’éviter que l’espèce colonise les lieux.

Nathalie Simard explique que des tests ont aussi été effectués à certains endroits sur la Côte-Nord ou en Gaspésie. Tous les tests se sont avérés non concluants.

Screen Shot 2022-01-10 at 10.36.26 AM

Par contre, cela ne signifie pas que d’autres envahisseurs ne sont pas présents puisque, pour l’instant, seuls les tests pour le crabe vert et pour l’ascidie sont effectués, car ce sont les deux espèces les plus préoccupantes.

Éventuellement, la détection par acide désoxyribonucléiqueADN environnemental pourrait s’étendre à toute espèce sous surveillance.

Près d’une vingtaine d’espèces sont sous surveillance, dont sept sont désormais présentes dans le Québec maritime.

Nathalie Simard répugne à donner un chiffre précis. «On a une watch list, mais on sait qu’il y a des espèces qui peuvent arriver sans qu’elles passent par la Nouvelle-Écosse ou par la côte Est des États-Unis.»

Le potentiel de la méthode est là, relève la biologiste. Ce sont des outils de monitorage qui pourraient nous servir à couvrir beaucoup plus de territoire, ajoute la chercheure.

Un vaste territoire marin sous haute surveillance

La détection par acide désoxyribonucléiqueADN environnemental est toujours utilisée en complément d’autres méthodes et s’ajoute à l’arsenal de lutte contre les espèces invasives.

Le programme de surveillance des espèces envahissantes couvre près d’une quarantaine de sites d’échantillonnage répartis entre le fjord du Saguenay et les Îles-de-la-Madeleine.

Dans l’estuaire, les espèces suivies par le programme et qui pourraient s’installer à court terme – elles sont déjà présentes dans les Maritimes ou sur la côte Est américaine – n’ont pas été repérées jusqu’à présent.

Des collecteurs, par exemple des pièges pour des tuniciers envahissants, ont aussi été installés dans des sites d’aquaculture, notamment en Basse-Côte-Nord. Pour l’instant, ils n’ont pas d’espèces envahissantes en Basse-Côte-Nord, mais on veut être présents sur le terrain, indique la responsable du programme.

Pour protéger la culture des algues

Dans la baie des Chaleurs et à certains endroits sur la Côte-Nord, deux espèces envahissantes, aussi présentes aux Îles, sont étroitement surveillées.

Il s’agit de la caprelle japonaise, un petit crustacé qui infeste les bouées et les cordages, et de membranipora, qui peut envahir les champs de laminaires.

Tant sur la Côte-Nord que dans la baie des Chaleurs, il n’y a pas d’infestations très sérieuses à part celle du membranipora lorsque, certaines années, l’eau est plus chaude, indique Mme Simard.

 Screen Shot 2022-01-10 at 10.34.01 AM

Dans les eaux du Maine, Pêches et Océans rapporte que membranipora a déjà causé la destruction de forêts entières de laminaires, ce qui peut être la cause de graves dommages à l’habitat de nombreuses espèces.

Même si elle n’est pas toxique, membranipora peut aussi représenter un sérieux inconvénient pour la culture d’algues, en émergence dans la baie des Chaleurs.

Un projet de détection rapide de la présence de membranipora est en cours en collaboration avec les aquaculteurs pour leur permettre de récolter leurs algues avant la colonisation.

Malgré le rôle important que joue le programme pour contrer la propagation des espèces non désirables, Nathalie Simard rappelle que le principal facteur demeure la prévention. Une fois qu’elles sont établies, il n’y a pas grand-chose à faire.

Le comportement responsable de la population, notamment lors de la navigation, demeure un élément clé de la lutte.