Scepticisme quant à la fin du recours aux agences privées d’ici 2026 dans l’Est

Publicité

Articles similaires

Plus de 200 Madelinots assistent à une séance municipale houleuse

Perturbée par du chahut, des demandes de démission et...

Le paiement de la Passe Archipel devient facultatif

La Municipalité des Îles-de-la-Madeleine rend facultatif le paiement de...

Lobster roll – Guédilles au homard

PORTIONS : 4 guedilles PRÉPARATION : 15 min CUISSON : 2...

Naufrage d’un bateau de pêche aux moules près de Malpèque, 5 personnes sont secourues

À l’Île-du-Prince-Édouard, un bateau de pêche aux moules s'est...

Le ministre de la Santé du Québec, Christian Dubé, croit être en mesure d’abolir le recours aux agences de placement dans le réseau de la santé d’ici trois ans. Cela soulève des questions dans l’Est-du-Québec, puisque le réseau de la santé dépend beaucoup de cette pratique pour combler les besoins en main-d’œuvre.

Avec son nouveau projet de loi 10 déposé mercredi à l’Assemblée nationale, le ministre Christian Dubé souhaite abolir le recours à la main-d’œuvre issue d’agences privées d’ici 2024 dans les grands milieux urbains de la province.

Mais pour les régions plus éloignées, la transition devrait être achevée en 2026.

Le président de la CSN Côte-Nord, Guillaume Tremblay, voit d’un bon œil que le gouvernement donne plus de temps aux régions pour mettre fin au recours à la main-d’œuvre indépendante (MOI).

Il demeure toutefois sceptique quant à la volonté de Québec de cesser complètement cette pratique en région.

Ce n’est pas clair, à date, s’il va éliminer complètement la place du privé dans le secteur public. Dans tous les corps d’emploi [en santé en région] les agences sont partout. On n’a pas le choix d’y aller en transition, parce qu’il y aurait des bris de services importants, affirme Guillaume Tremblay.

Capture d’écran, le 2023-02-17 à 08.29.14

Le recours aux agences s’est intensifié dans l’Est

Le recours à la main-d’œuvre indépendante s’est considérablement intensifié depuis cinq dans l’Est-du-Québec.

Le Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de la Côte-Nord a dépensé plus de 102 millions de dollars pour les salaires de travailleurs issus de la main-d’œuvre indépendante au cours de l’année 2021-2022, soit presque huit fois plus qu’en 2018-2019.

Même son de cloche au CISSS de la Gaspésie. La main-d’œuvre indépendante a ainsi représenté une masse salariale de 1,2 million de dollars en 2017-2018 et de 25,5 millions de dollars en 2021-2022.

Capture d’écran, le 2023-02-17 à 08.29.29

La situation est semblable au CISSS du Bas-Saint-Laurent.

Avec 44,6 M$ en 2021-2022, les coûts engendrés par l’embauche de personnel issu des agences privées ont été près de 30 fois plus élevés qu’il y a 5 ans au Bas-Saint-Laurent.

Aux Îles-de-la-Madeleine, le recours à la main-d’œuvre indépendante plombe de la même manière les finances du CISSS.

Les agences, essentielles en région?

Viviane Legault est une infirmière d’agence qui a fait du dépannage aux Îles-de-la-Madeleine au cours des 18 derniers mois. Elle constate un apport significatif des agences de placement au système de santé en région.

Je pense que [la fin du recours aux agences privées] va amener un fardeau pour le personnel qui travaille en région. Aux Îles-de-la-Madeleine, c’est arrivé à maintes reprises, de soir et de nuit, qu’on était que des [employés de la main-d’œuvre indépendante] qui géraient le département de l’urgence et des soins intensifs, raconte-t-elle.

Capture d’écran, le 2023-02-17 à 08.29.57

Par ailleurs, avec ce projet de loi 10, les taux horaires pourront être plafonnés par le ministère et des infractions pénales sont prévues en cas de non-respect des nouvelles règles.

Viviane Legault ne compte pas revenir travailler en région si le salaire horaire offert par son agence de placement diffère.

km de chez moi, loin de ma famille et mes amis. Ça prend un incitatif. Je ne pense pas que la prime de région éloignée suffit","text":"Je suis allée travailler à plus de 1500km de chez moi, loin de ma famille et mes amis. Ça prend un incitatif. Je ne pense pas que la prime de région éloignée suffit"}}">Je suis allée travailler à plus de 1500 km de chez moi, loin de ma famille et mes amis. Ça prend un incitatif. Je ne pense pas que la prime de région éloignée suffit, ajoute-t-elle.

Elle croit que les primes versées par le gouvernement pour les régions éloignées ne vont pas réussir à attirer des travailleurs de la santé, contrairement aux conditions de travail offertes par les agences privées.

Capture d’écran, le 2023-02-17 à 08.30.13

Des agences de placement commencent à réagir au projet de loi 10.

Selon la directrice adjointe de l’agence MaP Santé, Émilie Demers, le projet du gouvernement, dans sa forme actuelle, ne sera pas suffisant pour inverser la tendance.

[de travailler pour une agence]","text":"Présentement, je crois qu’il y a beaucoup d’employés qui sont en agence parce qu’ils n’ont plus les mêmes exigences qu’au public. Ils pourraient se réorienter dans d’autres domaines s’ils n’ont pas le choix [de travailler pour une agence]"}}">Présentement, je crois qu’il y a beaucoup d’employés qui sont en agence parce qu’ils n’ont plus les mêmes exigences qu’au public. Ils pourraient se réorienter dans d’autres domaines s’ils n’ont pas le choix [de travailler pour une agence], soutient-elle.

Le constat est toutefois bien différent du côté de l’agence Nomade.

Son propriétaire, Aymeric Côté-Gadoua, se réjouit du projet de loi 10.

avait plafonné le tarif horaire à près de 72$ [jusqu'au 31décembre2022], ça n’avait pas influencé notre offre qui était très semblable aux limites imposées. Si le gouvernement cherche à revenir à ces limites, ça ne va rien changer pour nous","text":"Je pense que c’est une très bonne nouvelle. On ne change pas notre mission. Quand le gouvernement avait plafonné le tarif horaire à près de 72$ [jusqu'au 31décembre2022], ça n’avait pas influencé notre offre qui était très semblable aux limites imposées. Si le gouvernement cherche à revenir à ces limites, ça ne va rien changer pour nous"}}">Je pense que c’est une très bonne nouvelle. On ne change pas notre mission. Quand le gouvernement avait plafonné le tarif horaire à près de 72 $ [jusqu’au 31 décembre 2022], ça n’avait pas influencé notre offre qui était très semblable aux limites imposées. Si le gouvernement cherche à revenir à ces limites, ça ne va rien changer pour nous, précise-t-il.

Capture d’écran, le 2023-02-17 à 08.30.26

Alors que des agences privées réclament aujourd’hui 100 $ l’heure, et parfois plus, pour les services d’une infirmière à temps régulier, Aymeric Côté-Gadoua considère que le projet de loi 10 pourrait redorer l’image d’autres entreprises comme la sienne.

à 60agences qui coûtent plus cher que nous","text":"On le sait qu’il n’y aurait pas d’agences dans un monde idéal. Il faut arrêter de penser qu’il faut aller puiser dans les fonds publics puisqu’il y a un manque d’employés [dans le système public]. L’agence Nomade est du bon côté de la médaille. Il y a environ 50à 60agences qui coûtent plus cher que nous"}}">On le sait qu’il n’y aurait pas d’agences dans un monde idéal. Il faut arrêter de penser qu’il faut aller puiser dans les fonds publics, puisqu’il y a un manque d’employés [dans le système public]. L’agence Nomade est du bon côté de la médaille. Il y a environ 50 à 60 agences qui coûtent plus cher que nous, affirme-t-il.

À l’Assemblée nationale, le député des Îles-de-la-Madeleine et porte-parole du Parti québécois en matière de santé, Joël Arseneau, estime que le projet de loi 10 manque de précision.

Il souhaite notamment que le projet de loi s’accompagne aussi d’un plan clair afin d’améliorer les conditions de travail des infirmières.

À l’échelle du Québec, selon une analyse de données des CISSS et des CIUSSS réalisée par le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), affilié à la FTQ, le gouvernement du Québec a dû verser 3 milliards de dollars supplémentaires à des agences de placement privées entre 2016 et 2022 pour combler les besoins de personnel dans le réseau de la santé.

LA UNE : Le recours à la main-d’œuvre indépendante (MOI) s’est considérablement intensifié depuis cinq dans l’Est-du-Québec. PHOTO : ISTOCK
PAR Charles-Étienne Drouin avec la collaboration d’Isabelle Damphousse, d’Aurélie Girard et de Guillaume Whalen